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MAISON À DEUX PORTES.

ment puis-je vous laisser aller à présent, moi qui vous suivais avant de vous avoir vue ?

marcela.

Soyez tranquille sur mon compte. Vous connaîtrez bientôt ma maison et à quel point je désire vous obliger, je vous en réponds de nouveau.

lisardo.

Quoique à regret, madame, j’obéis.

marcela.

Et moi, je vous laisse avec un cœur reconnaissant. Je m’en vais par cette rue.

lisardo.

Allez avec Dieu !

marcela.

Le ciel vous garde !

Marcela et Silvia sortent.
calabazas, à Lisardo.

Quoi ! seigneur, ne voyez-vous pas que c’est un piége qu’on vous tend ? Suivons-la, suivons-la jusqu’à ce que nous sachions au juste quelle est cette rusée de femme.

lisardo.

Ce serait mal à nous, Calabazas, si elle juge ces précautions nécessaires.

calabazas.

Est-ce bien vous qui parlez ainsi ?

lisardo.

Oui, moi-même.

calabazas.

Vive Dieu ! si j’étais que de vous, je la suivrais, allât-elle au fond de l’enfer !

lisardo.

Imbécile ! ce serait la bien récompenser d’avoir consenti à me parler que de lui causer un tel chagrin !

calabazas.

C’était bien la peine de nous lever si matin tous ces jours-ci !

lisardo.

Trêve de plaisanteries !… Dis-moi plutôt, maintenant que nous sommes seuls, voyons à nous deux si nous devinerons quelle peut être cette femme mystérieuse.

calabazas.

Volontiers, monseigneur. Vous, d’abord, qu’en pensez-vous ?

lisardo.

Ma foi ! à la distinction de son langage, à l’élégance de sa toilette, je serais assez porté à croire que c’est quelque noble dame, ou folâtre ou fantasque, qui aime a causer secrètement avec les