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LA VIE EST UN SONGE.


(LA VIDA ES SUEÑO.)

NOTICE.

La Vie est un songe, l’une des pièces les plus célèbres de Calderon, fut imprimée en 1640 par les soins de don Diègue Calderon, frère aîné de notre poète. Cet ouvrage appartient donc à la première moitié de sa carrière.

Les anciens ont proclamé, depuis bien des siècles, que la vie n’est qu’un rêve. Pindare a même dit, je crois, que c’était le rêve d’une ombre. Mais le développement de cette pensée revenait de droit à un poète chrétien et catholique.

Si je ne me trompe sur l’intention de Calderon, il a voulu montrer dans cette pièce l’irrésistible puissance de la destinée, ou, pour mieux parler, de la Providence. Nous ne sommes point maîtres de nos actions ; une volonté supérieure nous mène malgré nous, et tout le mal que nous faisons pour nous y soustraire est un mal inutile. Mais il n’en est pas de même du bien que nous pouvons faire : il nous servira à nous-mêmes ; il nous sera compté dans une autre vie, qui n’est pas un rêve.

La pensée a peine à considérer, sans une sorte de vertige, la profondeur de ce drame, qui lui-même, comme un rêve étrange, frappe fortement l’esprit, et laisse dans l’âme une longue impression.

Cette pièce, fort sérieuse, a aussi une partie comique. Rien de plus charmant, à notre avis, que la première scène de la troisième journée, où Clairon est pris pour un prince ; et ce qu’il y a d’admirable, c’est de voir comme cette scène bouffonne rentre dans le sens général de la pièce.

La Vie est un songe fut, dans le siècle dernier, imitée par Boissy, et de notre temps cette pièce a été traduite en allemand par Schlegel.