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LE MÉDECIN DE SON HONNEUR.

d’une chasse, je verrai celle que j’aime. (Haut.) Viens avec moi, don Diègue. (À part.) Je serai vainqueur ou je périrai.

L’Infant et don Diègue sortent.
doña léonor, seule.

Grands dieux, je me meurs ! — Ingrat, perfide et traître, sans loi et sans foi, daigne le ciel me venger de l’injure que tu as faite à mon honneur ! Puisses-tu souffrir les mêmes maux que je souffre, et mourir pareillement déshonoré ! — Hélas ! hélas !… amen ! amen !


JOURNÉE DEUXIÈME.


Scène I.

Un jardin ; il est nuit.
L’INFANT et JACINTHE entrent en marchant à tâtons.
jacinthe.

Doucement ! Pas de bruit !

l’infant.

À peine si je pose le pied sur le sol, à peine si je respire.

jacinthe.

Vous voici au jardin. Et comme don Gutierre est en prison et que la nuit vous favorise de ses ténèbres, n’en doutez pas, monseigneur, vous obtiendrez tout ce que votre altesse désire. Ce sera là une douce victoire.

l’infant.

Jacinthe, si la liberté que je t’ai promise te semble une trop faible récompense pour un si grand service, demande davantage et tu l’auras. Je te dois plus que la vie, je te dois la joie et le bonheur de mon âme.

jacinthe.

C’est ici que ma maîtresse a coutume de venir. Elle passe d’ordinaire une partie de la nuit sous ce berceau.

l’infant.

Tais-toi, tais-toi ; je crains que le vent ne nous écoute, et que l’écho ne trahisse nos paroles.

jacinthe.

Je vous laisse ; moi, afin que mon absence ne réveille aucun soupçon, je vais de ce côté.

Elle sort.
l’infant.

Amour, amour, protége-moi ! Que ce feuillage épais me cache à les yeux ! — Je ne suis pas le premier dont le feuillage des bois