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lui-même ne le sait plus, M. Ferdinand Buisson était, ce qui est autrement capital, en France, le grand-maître de l’enseignement primaire. À ce titre vingt-cinq ou trente générations de Français, — je compte par générations annuelles, — vingt-cinq ou trente annuités de bons Français lui passèrent plus ou moins indirectement par les mains. Sans compter que tous les mouvements auxquels nous assistons aujourd’hui qui ont lieu dans le primaire ne sont que des continuations, plus ou moins directes, plus ou moins justifiées, plus ou moins suivies et avouées, plus ou moins bâtardes ou reconnues, plus ou moins fidèles, de ce grand mouvement initial. On sait en quoi consistait cette opération, qui a parfaitement réussi, comme toutes les opérations de cet ordre. Il n’y avait qu’à feindre un petit ancien régime, commode, portatif, bon enfant, et tout prêt à se laisser convaincre et battre, d’ailleurs parfaitement faux, en mettant bout à bout quelques anecdotes plus ou moins controuvées que l’on avait demandées au règne de Louis XV, quelques racontars empruntés au règne de Louis XVI ; et pour qu’il ne fût point dit que l’on n’était pas remonté assez haut, assez aux sources, quelques ragots venus, descendus jusque du règne de Louis XIV. Peut-être même le régime de Louis XI était-il mis à contribution. Mais je ne sais pourquoi, on se gardait comme du feu de mettre à contribution le régime et le règne de Louis IX (il n’y avait pourtant qu’une toute petite interversion graphique à faire, le I à changer de place, à mettre avant le X, au lieu d’après) Joinville, Guillaume de Nangis, et le confesseur de la reine Marguerite. Car il fallait aller, décidément, et ne s’arrêter point avant les origines. Il y avait même dans tout cela un assez grand