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parce que son père et sa mère étaient d’honnêtes gens, que toute sa vie on lui fourrera les sales besognes. Ou du moins ces admirables petits métiers, tenus et tenants, pieux et modestes, que les grands de ce monde cotent comme de sales métiers. Il sait pertinemment que toute sa vie on lui fera éreinter les yeux à corriger des copies et des compositions ou de la copie et des épreuves d’imprimerie

Dans les honneurs obscurs de quelque légion.

Mais il aime cela, cet homme. Il est si bête qu’il ne pense même pas à nommer cela probité, honnêteté, goût et passion de la liberté. Il exècre le mot même de pureté. Parce que de tous les sépulcres les sépulcres blanchis sont encore ceux qui lui paraissent le plus cimetières. C’est nous, les cuistres, qui nous amusons à donner à tout cela des noms de vertus. Avec notre manie de faire des catalogues et des index. Il n’a besoin ni de nos classements, ni de nos encouragements, ni de nos conseils. Tout ce qu’il sait, cet ignorant, c’est qu’il y a des démarches que les autres font tout le temps et qu’il ne fera jamais, pas même une fois, pas même un seul quart d’heure. Parce que ce quart d’heure lui resterait sur l’estomac, lui serait impossible à digérer.

Tout ce qu’il sait aussi, tout ce qu’il sait enfin, car il voit de loin, et au loin, il voit jusqu’au bout, c’est que sa vie sera telle, toute entière, et que telle sera sa mort, qui est pour lui comme une sorte de fin de sa vie.

Car pour cette sorte de gens, de petites gens, elle