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génie traîne mon âme pantelante sur la suie des enfers ?

Rêves atroces des nuits, fuyez, ne chantez plus, ne dansez plus ensemble, ne vous prostituez plus les uns aux autres sur ma couche de feu ! Disparaissez visions, hallucinations, désespoirs et tortures !

Démon qui agitas Luther et Christ, et Jean-Jacques et Socrate, et Swedenborg l’Illuminé, démon qui bois ma vie, démon suceur de moëlle, archange des épouvantements, âme de fer et de bronze que rougissent des flammes renaissantes toujours : laisse-moi ! Fais-moi libre ou rends-moi ricaneur, insensible au mal, comme ton esprit de soufre. Je veux bien être ton complice, je ne saurais demeurer ta victime. Depuis quand les anges rebelles s’acharnent-ils sur leurs amis ? Sors de moi, démon ! — Jamais, répond la voix qui crie dans mes entrailles :

Hæret lateri lethalis arundo !


V

23 Sur la nature s’étend la douleur de mon âme, sa douleur infinie ! Le lac est un miroir, les fleurs sont sa couronne, et les glaciers son trône. Elle me précède dans les sentiers des montagnes, sous les chemins couverts qui bordent les ruisseaux. Aucune sensation joyeuse, aucune espérance ne peuvent arriver jusqu’à mon cœur sans traverser