Page:Cœurderoy - Jours d'exil, tome II.djvu/321

Cette page a été validée par deux contributeurs.

ce sont les promeneurs, ces acteurs sans entrain qui répètent chaque soir le petit bout de rôle qu’ils réciteront le lendemain sur la scène du monde. Or, 194 à ce point de vue, le Prado ne diffère pas des autres promenades bourgeoises.


Venez-y plutôt voir, ceux qui croient le contraire. Cela ne fera pas le compte de MM. Gautier, Dumas et autres farceurs qui vous font part d’impressions de voyage recueillies en quelques jours des fenêtres de leur hôtel, intimement persuadés que vous n’irez pas vérifier leurs assertions menteuses.


IV


Voici ce que l’on trouve au Prado, rien de plus, rien de moins :

De la poussière, de la foule ; — des gardes municipaux qu’on appelle civils, ce que je ne crois pas ; des sergents de ville et des cantonniers ; — des équipages pressés les uns sur les autres qui promènent lentement la finance, la noblesse, l’illustration et le désœuvrement de première classe de toutes les Espagnes ; — deux magnifiques fontaines qui pourraient avoir de l’eau, sur lesquelles râlent sans merci l’infortuné Neptune, comme un poisson sur la paille, et Cybèle, notre divine mère, qui tire la langue aussi longue qu’une louve stérile, ardente au jeu d’amour. Vous y verrez encore beaucoup de chevaux anglais, d’andalous point,