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sociétés du passé qui étaient moins dévorées de besoins et les sociétés de l’avenir qui seront plus riches de ressources.

Mais il faut être ce que nous sommes. Une voix impérieuse presse l’humanité sur sa route semée de ronces et la fait marcher jusqu’à l’épuisement, jusqu’à la mort. En avant donc, et périssent les courses de taureaux comme les tournois, les arènes, les batailles et tous les jeux qui ruisselaient de sang !


XIX


Matador, bourreau, tueur de bêtes, assassin d’amour, assemblage de muscles, d’os et de sang qu’on revêt de broderies d’argent et d’or ! Je ne te parlerai pas de sensibilité, de cruauté, de l’univers, des rapports des êtres entre eux, des droits de 187 l’homme et de ceux de l’animal, du principe de ton existence et de la sienne. Tu ne sais rien de tout cela ; ton métier est de détruire pour vivre !

Mais il est un terrible proverbe qu’on répète dans toutes les Espagnes : le meilleur torero, c’est le taureau. Voilà qui est vrai, voilà qui doit aller jusqu’au fond de ton âme vulgaire. Les plus habiles sont tombés dans l’arène ; comme eux tu finiras, d’un coup de corne.

Et ce public qui te siffle, t’applaudit, te paye et te considère comme son jouet, ce public est conjuré contre ta vie parce que ta mort lui fournirait une émotion plus puissante que toutes les autres.