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IV


166 La fanfare éclate de nouveau. Sur des coursiers d’Andalousie s’avancent deux alguaziles vêtus de noir. Ils se découvrent et s’inclinent devant les membres de la municipalité. Que leur demandent-ils ? La permission d’introduire dans le cirque la Mort hideuse dont ils portent la couleur.

À la suite des alguaziles, comme une meute de dogues démuselés, défile la bande sanguinaire. Ces hommes sont revêtus des plus riches costumes espagnols ; quelques-uns portent sur eux pour plus de deux mille francs de soie, de velours, de paillettes d’or et d’argent.

Voici les matadores pleins de sang-froid, les banderilleros agiles, les picadores montés sur des rosses efflanquées et rapides comme des éclairs. Voici les mules avec leurs draperies flottantes et leurs mille grelots retentissants. Puis viennent leurs conducteurs qui s’efforcent de les retenir, et enfin la foule des toreros confondus avec les mâtins avides de carnage. — Tous se pressent et brûlent de répandre du sang.

Enfin les clefs du toril sont remises aux mains des alguaziles ; toutes les formalités légales sont remplies ; c’est en toute conscience que l’homme peut tuer maintenant. Les toreros se dispersent dans l’arène, agitant des lambeaux d’étoffes éclatantes, éperonnant les chevaux, attendant l’ennemi.