Page:Cœurderoy - Jours d'exil, tome II.djvu/255

Cette page a été validée par deux contributeurs.

hommes à vue longue le parcourent par chapitres afin d’en saisir l’ensemble d’un coup d’œil.

Enfant d’un pays en décadence, victime de l’injustice du siècle, il n’est pas surprenant que je cherche le bonheur dans les âges qui ne sont pas encore. Ah puissé-je entraîner sur ma trace les quelques êtres qui me sont chers ! Puissé-je les sauver des dangers du présent, les abriter dans l’arche d’alliance qui flotte sur les déluges, entre le Vieux et le Nouveau Monde !

Si mes forces ne m’ont pas trahi, si j’ai réussi dans mon entreprise, si j’ai comblé des vides, si j’ai fait un travail, l’Avenir le dira. Je récuse le jugement de mes contemporains. Ils sont trop affairés, trop tremblants pour leurs intérêts, trop menacés dans leurs existences, pour m’entendre et me voir. Ils ne savent plus où donner de la tête ; sur le sol mouvant ils piétinent comme des oisons sur le fer rouge ; ils n’osent plus dire un mot, plus avancer d’un pas. Les événements dépassent la portée de leurs intelligences.

Ils se renferment dans leurs maisons, tirent la clef derrière eux, s’attablent, mangent comme quatre, boivent comme dix, crèvent d’aise. Et bonjour les amis, les ennemis, la politique, la guerre, et la Démagogie, l’affreuse ! E felicissima notte ! Danse, Napoléon ! Défends-toi, Sébastopol ! Mourez si vous voulez, Caïns en habits rouges, pauvres soldats de France, guerriers de par la misère et la faim ! Flambez, feux d’artifice ! Paye, peuple, des deniers et du sang. Nous digérons :