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Comme tous les autres, l’usage de dénommer doit être soumis aux lois de la Transformation incessante et non plus aux codes de la Propriété.


XXI


Je travaille comme le semeur, le brave homme des champs qui se met à l’aise dans ses habits pour faire le plus d’ouvrage possible.

Selon moi, le costume de l’individu doit être en rapport avec le pays qu’il habite, la saison, la température, les circonstances et occupations de sa vie. La plus étroite des tyrannies est, sans contredit, celle de la Mode. Elle ne nous laisse pas un instant à nous-mêmes, elle nous fait surveiller par les mille regards de ses Argus et de ses fidèles, elle nous espionne dans nos moindres mouvements. Elle couvre d’un masque uniforme nos instincts les plus divers ; elle nous emprisonne de la tête aux pieds et nous 57 oblige à colporter notre prison sur nous par le chaud et le froid, le soleil et la pluie, les vents et la poussière, à la campagne comme à la ville. Elle nous pétrifie, nous momifie, nous ridiculise, nous cristallise, nous stalactise.

La forme trahit le fond. L’extérieur reflète l’intérieur. Assurément on ne peut pas juger d’un homme par le seul examen de sa mise, des protubérances de son crâne, des lignes de sa main, de l’expression de sa physionomie. Mais chacun de ces attributs superficiels indique une particularité