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L’homme ne doit plus être baptisé dès sa naissance, au hasard, quand rien encore ne révèle ses penchants ; ni son père, ni son nourricier, ni son parrain n’ont le droit de disposer ainsi de son avenir. La femme ne doit plus être rebaptisée par le mariage. 56 Le fils ne doit plus être condamné perpétuellement à s’appeler comme ses honorés ancêtres.

Notre nom doit être l’épigraphe de notre vie, nous représenter sous notre aspect le plus général et le plus saisissant, de manière que, seulement à l’entendre, on nous connaisse comme si l’on nous fréquentait d’habitude. Notre nom doit varier suivant l’âge, le lieu, le temps et les événements. Il doit y avoir des noms d’enfance, de jeunesse, d’âge mûr et de vieillesse. Il faut qu’on puisse en changer autant de fois que l’exigent la mobilité du naturel et les variations dans la manière de vivre. Aux uns il suffira d’un nom pour toute leur vie, les autres en useront autant que de chemises. L’essentiel, en un mot, c’est que l’État civil ne soit plus fixe, injuste et stupide comme le veut aujourd’hui le mode de possession.

Le surnom deviendra le véritable nom, ayant de bonnes raisons d’être, choisi par nous-mêmes ou par les autres, selon les événements, les incidents, les situations et conversations de notre vie. Nous le trouverons dans un accès de gaîté, de tristesse ou d’expansion, dans une de ces circonstances rares où l’homme se fait bien connaître.