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LA TERRE ANCESTRALE

admirer ; l’un était plus gras, l’autre avait grandi ; celui-ci parlait mieux ; enfin, tous étaient pour elles un sujet d’émerveillement. Et à travers un continuel babil, c’était des caresses, des taquineries, de joyeuses exclamations. Les hommes rentrés, le tumulte des voix augmenta. Parmi les fines ripostes, les francs éclats de rire, on ne pouvait garder une conversation suivie.

— Dis donc Louis, questionna railleusement Hubert, as-tu commencé à faire charroyer ton poulain ?

— Doucement mon garçon, tu ne riras peut-être pas le printemps prochain.

— C’est celui que tu as apporté dans une poche ? demanda Arthur Gagnon, le mari d’Élise.

— Je crois vraiment qu’il y aurait tenu. Le pauvre petit, ayant perdu sa mère, allait mourir de faim. À le voir diminuer de jour en jour, on aurait cru qu’il retournait vers la naissance. Je l’ai acheté pour moins que la valeur de sa peau ; je l’ai soigné comme un enfant, je l’ai même nourri au biberon.

— Pour ça, répondit le cadet, on sait que tu lui as servi de mère ; tu peux même te vanter d’être le protecteur des orphelins.

— Oui, et mieux, d’être père nourricier, car lorsque je l’ai pris, il paraissait vivre sans manger.