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la terre ancestrale

pas pour la maison paternelle. Les douze arpents qui la séparaient de la station furent vite franchis. Quand il l’aperçut de loin, son cœur battit plus fort. En passant le pont qui, sur la propriété de son père, traverse la rivière Chassé, il vit, devant l’étable, plusieurs voitures étrangères. Jean Rioux ne devait donc pas aller mieux. La nombreuse réunion qu’annonçaient tous ces véhicules, n’en devait pas être une de plaisir.

Il n’avait pas fini de traverser le pont, qu’il vit, à la porte de la demeure familiale, un grand crèpe noir que secouait mollement la brise. Au contraire du léger tissu blanc que de loin, en signe de joyeux accueil, l’on agite, et que le plaisir fait danser dans une main heureuse, la lourde banderole noire, symbole de la douleur, pendait flasque, sans vie, à la porte muette.

Hubert en reçut un choc qui le fit pâlir et s’arrêter dans sa marche.

L’implacable glaneuse avait donc cueilli l’épi mûr.

Faisant un effort, il continua d’avancer, mais d’un pas hésitant, furtif, comme craignant le bruit qu’il produisait. Il frappa, mais aussitôt ouvrit la porte, ne voulant pas que, comme un étranger, sous le toit paternel, on eût à lui dire d’entrer.