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la terre ancestrale

VII

La foudre tombe

Septembre s’achevait. Le soleil venait de rentrer dans les montagnes du nord, par-delà le fleuve. Un faible reste de lumière, dernier éclat de l’astre, lueur captée et réfléchie par les nuages, coulait horizontalement sur le sol. La nuit s’avançait, mais le jour n’avait pas encore fui. Les ombrages, nés de la clarté, n’existaient plus ; les ombres de la nuit, faute d’astres, n’apparaissaient pas encore. Les bruits diurnes décroissaient : les sons qui sortent de l’obscurité, étaient encore aphones. Dans l’atmosphère calme, l’écho éclatait plus sonore. L’air frais annonçait une forte gelée. Les insectes, frileux, s’étaient terrés : les oiseaux, affamés de soleil et de chaudes brises, avaient émigré vers l’équateur. La nature se préparait à son sommeil hivernal.

Dans Trois-Pistoles, les attelages terminaient leur travail : vers les granges descendaient les charges de blé, les dernières du jour. De toutes les fermes, on entendait les commandements des moissonneurs. Juchés sur leur charrette, en clamant leur bonheur, ils lançaient aux vibrations de l’écho, d’une voix forte mais mal assurée, quelque complainte du vieux temps. Ailleurs, une fraîche jeune fille,