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DES DAMES FRANÇAISES.


Le nom de mère, hélas ! qui fit tout mon bonheur,
Ses accens douloureux l’ont gravé dans mon cœur.
Par un dernier effort où survit sa tendresse,
Je la vois surmonter ses tourmens, sa faiblesse ;
Ses yeux cherchent mes yeux, sa main cherche ma main,
Elle m’appelle encore et tombe sur mon sein...
Dieu puissant, Dieu cruel, tu combles ma misère !
C’en est fait, elle expire, et je ne suis plus mère !
Ses yeux, ses yeux si doux sont fermés pour toujours.
Ma fille !... Non, le sort n’a pas touché tes jours ;
Me séparer de toi n’est pas en sa puissance ;
La preuve de ta vie est dans mon existence.
Oh ! reste dans mes bras ; pour combattre tes maux
J’inventerai des soins et des secours nouveaux.
Tout deviendra possible au transport qui m’inspire :
Ma fille, tu vivras puisqu’enfin je respire.
Accusant, menaçant, implorant tous les dieux,
J’invoquerai pour toi les enfers et les cieux
Palpitante d’effroi, ta mère infortunée
Ose te disputer à la Mort étonnée ;
Entends, entends mes cris... Tu ne me réponds plus
O trop aveugle espoir ! ô tourmens inconnus !
Dieu, rends-moi mon erreur et ce transport funeste :
Mon délire est, hélas ! le seul bien qui me reste.

III


Toi qui fis de mes jours le charme et le tourment,
Toi que tant de soupirs rappellent vainement,
Ma fille ! cher objet d’amour et de souffrance,
Ah ! laisse mes regrets errer sur ton enfance.
Rends à mon cœur trompé ces jours remplis d’appas
Où mes plus tendres soins ne me rassuraient pas.