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CHEFS-D’ŒUVRE POÉTIQUES


À MA MUSE.
ÉPILOGUE


Muse, vous dont la voix douloureuse et chérie
Au jour que je fuyais a rattaché ma vie,
Et qui m’avez fait voir, au travers de mes pleurs,
Son épineux sentier jonché de quelques fleurs ;
Par le malheur elle était obscurcie :
Par vos innocentes douceurs
Vous l’avez ranimée, éclairée, embellie ;
Ô Muse, je vous remercie.
Quand j’ignorais, hélas ! vous et mon triste sort,
Dans la langue des dieux je redisais sans cesse
Les vers si doux que sans effort
À Racine dictait sa Muse enchanteresse.
Des neuf savantes sœurs j’adorais les appas ;
Mais à vous je ne pensais pas.
Vous dormiez sans songer à vous faire connaître.
Grands dieux ! que j’étais loin de croire à vos faveurs !
Mais, réveillée enfin aux cris de mes douleurs,
Dans mon cœur je vous sentis naître,
Et de ce cœur brisé sortir avec mes pleurs.
Depuis lors, sans être appelée,
Je vous vis quelquefois animer mes loisirs ;
Muse, vous avez su les changer en plaisirs ;
Et, par vos charmes consolée,
Bientôt j’osai vous suivre et saisir vos pinceaux.
Que de soins je pris pour vous plaire !
De vous je n’attendais alors pour tout salaire