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Où la raison éclairera ton cœur ;
Où moins frivole, et digne de son être,
Ton ame enfin connoîtra sa grandeur ;
Moments chéris ! empressez-vous d’éclore !
Mais qu’ai-je dit ? où tendent mes souhaits ?
Ma fille, hélas ! par ces vœux indiscrets,
C’est ton malheur, peut-être, que j’implore.
Dans ce berceau, que n’habita jamais
Le noir soupçon, la sombre défiance.
Tu dors sans crainte ; une heureuse ignorance
T’y fait jouir des charmes de la paix.
Tu dors… le ciel protège ton asile ;
Là, ton repos, aussi doux que facile.
Des soins amers est toujours respecté ;
Et quand tes yeux s’ouvrent à la clarté,
Comme en ton cœur, ton regard est tranquille.
Tu ne vois pas le funeste concours
Des ennemis, des maux qui t’environnent ;
Tu ne sais pas quels dangers empoisonnent
Ce monde vain où couleront tes jours :
Des passions la triste connoissance
N’a point encor troublé ton innocence.
Tu ne verras que trop tôt leurs effets ;
Trop tôt, hélas ! en butte à leur puissance,
Tu donneras d’inutiles regrets
Au calme heureux dont jouit ton enfance ;
Et si jamais d’un charme impérieux
Le faux prestige égaroit ta foiblesse ;
Si quelque jour tu condamnois mes yeux
À d’autres pleurs qu’à ceux de la tendresse…
Ô mes seuls dieux ! ô vertus ! ô talens !
Du haut des cieux, veillez sur sa jeunesse ;
Loin de ma fille, écartez ces tyrans.
Plus d’une fois, mon cœur qui vous adore