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Sa voix, d’abord incertaine et timide,
En longs éclats fait retentir les airs :
Bientôt il tente un essor plus rapide ;
Bientôt ses chants, suivis et cadencés,
Sont avec art ralentis ou pressés.
Ce n’est pas tout : de ce nouveau langage
Il sait déjà varier les accens :
Veut-il d’Amour vanter les traits puissans,
Sa voix bruyante étonne le bocage ;
Célèbre-t-il la beauté qui l’engage,
Sa voix touchante intéresse et ravit ;
Peint-il l’ardeur dont son ame est atteinte,
Les dieux des bois soupirent de sa plainte,
Et, comme lui, Philomèle gémit.
Tous les Zéphyrs, assemblés pour entendre
Ces airs charmans, vont au loin les répandre.
Aminte, au bruit de ces accens nouveaux,
S’étonne, cherche et promenant sa vue
De tous côtés… Ô surprise imprévue !
C’étoit Hilas qui charmoit les échos :

— Hôtes légers de ces bocages,
Oiseaux, disoit-il dans ses chants,
Enseignez-moi votre ramage ;
Ma bergère aime vos accens ;
Fussent-ils plus tendres encore,
Ils ne sauroient rendre jamais
L’excès des charmes que j’adore
Ni l’excès des maux qu’ils m’ont faits. —

Le berger dit, et l’ingrate l’admire ;
Son cœur s’émeut pour la première fois ;
Elle ne peut abandonner ces bois ;
En les quittant elle rêve et soupire.