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Tout à un coup je ris et je larmoye,
Et en plaisir maint grief tourment j’endure ;
Mon bien s’en va, et à jamais il dure.
Tout en un coup je seiche et je verdoye.
 
Ainsi amour inconstamment me meine :
Et quand je pense auoir plus de douleur,
Sans y penser je me trouue hors de peine.

Puis quand je croy ma joye estre certeine ;
Et estre au haut de mon désiré heur,
Il me remet en mon premier malheur.


III

 
Tout aussi tot que je commence à prendre
Dans le mol lit le repos désiré,
Mon triste esprit hors de moy retiré
S’en va vers toy incontinent se rendre.

Lors m’est auis que dedens mon sein tendre
Je tiens le bien où j’ay tant aspiré,
Et pour lequel j’ay si haut souspiré,
Que de sanglots ay souuent cuidé fendre.
 
O dous sommeil, ô nuit à moy heureuse !
Plaisant repos, plein de tranquilité,
Continuez toutes les nuiz mon songe :

Et si jamais ma poure ame amoureuse
Ne doit auoir de bien en vérité,
Faites au moins qu’elle en ait en mensonge.