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NOTES.

nomment « les quatre apâyas, » ces quatre dernières existences[1] et âpâyika, celui qui est condamné à une de ces existences. Le mot apâya est également usité chez les Buddhistes du Nord, et il en doit être autant de son dérivé âpâyika. Le Djina alam̃kâra emploie cette expression qu’on doit retrouver souvent : tchatusu apâyêsu patitva, « étant tombé dans les quatre états de punition[2]. »

Cette pensée s’éleva dans l’esprit du Bôdhisattva.] Le texte se sert ici d’une expression propre au sanscrit buddhique et qu’il possède en commun avec le pâli, c’est la locution bôdhisattvasya êtad abhavai, littéralement « cela fut au Bôdhisattva. » On dirait en pâli bôdhisattassa êtad ahosi. Il y a un exemple de cette locution dans un texte pâli qui fait partie des fragments publiés par M. Spiegel[3].

L’apparition merveilleuse d’un grand miracle.] Le texte se sert ici de l’expression mahânimitta prâtihârya, qui est spécialement propre au style buddhique de toutes les écoles, et que l’on retrouve dans le pâli de Ceylan sous la forme de pâṭihâriya. En voici un exemple que je cite, parce qu’il rappelle par un trait court, mais expressif, une idée familière aux Buddhistes du Nord : Tattha tattha dassitapâṭihâriyêṇâpi mahâdjanô pasîdati. « La foule du peuple est disposée à la bienveillance par les miracles qu’on lui fait voir çà et là[4]. » Ce passage est certainement inspiré par le même esprit que ceux que j’ai cités ailleurs sur la destination et l’efficacité des miracles dans le Buddhisme[5].

Puissance surnaturelle.] Le mot que je rends de cette manière est rĭddhi, en pâli iddhi, terme que les Mongols ont emprunté ainsi que quelques autres au sanscrit, sans le modifier[6]. C’est à l’aide de leur puissance surnaturelle, véritable pouvoir magique, que les Buddhas et les autres personnages qui sont parvenus au degré suffisant de sainteté, accomplissent les miracles qui jouent un si grand rôle dans les légendes buddhiques. On peut consulter sur l’étendue et les effets de cette prétendue puissance, une note d’Abel Rémusat, rédigée d’après des autorités chinoises, mais dont les détails se retrouveraient épars, soit dans notre Lotus même, soit dans d’autres ouvrages de la collection népalaise de M. Hodgson[7]. Dans la note à laquelle je renvoie le lecteur, les expressions les yeux du ciel, les oreilles du ciel, sont très-probablement la traduction des expressions sanscrites dêva tchakchus, dêva çrôtra ; et nous avons un exemple, sinon de ces facultés divines, du moins d’une perfection d’organes qui en approche, dans notre Lotus de la bonne loi même, chap. XVIII, pag. 215 et suiv.

La puissance surnaturelle ou magique nommée rĭddhi repose sur quatre fondements, ou se compose de quatre portions nommées Rĭddhipâda, que j’ai eu occasion de citer

  1. Upham, The Mahâvansi, t. III, p. 25 ; Clough, Singhal. Diction., t. II, p. 697.
  2. Djina alam̃kâra, f. 5 b init.
  3. Anecdota pâlica, p. 83.
  4. Djina alam̃kâra, f. 26 b.
  5. Introd. à l’hist. du Buddh. t. I, p. 462 et suiv.
  6. Pallas, Sammlung. hist. Nachricht. t. II, p. 386 ; I. J. Schmidt, Geschichte der Ost-Mongol. p. 312 ; Foe koue ki, p. 32, 246 et 248.
  7. Foe koue ki, p. 32, note 6.