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rent à d’autres qui existaient auparavant, qu’elles subjuguèrent, qu’elles maintinrent dans un état d’abaissement, et avec lesquelles elles s’efforcèrent de ne pas se mêler, parce qu’elles étaient d’un autre sang. Le pays sur lequel nous avons à cet égard le plus de renseignements est l’Inde. Lorsque les Aryas y descendirent par la vallée du Caboul, ils étaient peu nombreux, et leurs adversaires, de race inférieure, l’étaient beaucoup. L’orthodoxie, en s’y fondant sur un système de castes d’une solidité merveilleuse, mit le sacerdoce à une si grande distance des barbares asservis, que la pureté de la race aryenne, dans ses castes supérieures, fut préservée et n’a pas encore disparu. Toute cette dernière trouva donc un avantage à défendre un système protecteur, sans lequel elle eût bientôt vu son sang se mêler et se perdre dans celui des « dasyous impies et mangeurs de chair crue. ».

Ce qui s’est passé sur l’Indus dans d’immenses proportions s’est produit partout ailleurs dans des proportions moindres et dans des conditions différentes ; mais partout l’orthodoxie a été la force protectrice et l’élément conservateur des races. N’en avons-nous pas aujourd’hui même une preuve vivante dans l’orient de l’Europe, où les Hellènes, après avoir adopté une orthodoxie chrétienne, n’ont pas répugné à se mêler avec des hommes du nord et même avec des gens de race touranienne, comme les Bulgares, lesquels avaient, eux aussi, adopté cette orthodoxie ; tandis que ces mêmes Hellènes sont restés invinciblement séparés des hommes de cette même race touranienne qui, sous le nom de Turcs, avaient adopté l’islamisme ? Ce n’est donc pas toujours les races qui séparent les orthodoxies ; les orthodoxies aussi maintiennent la séparation des races.

L’exemple cité montre que l’orthodoxie n’agit pas seulement dans le sein d’une société pour en tenir,