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INTRODUCTION À L’HISTOIRE

c’est entre le VIIe et le XIIIe siècle de notre ère que les livres buddhiques ont été traduits dans la langue du Bot[1]. Ce fait, que je rappelle sous la garantie du savoir de Csoma, aura sans doute besoin d’être étudié dans tous ses détails. Il faudra rechercher si le travail de l’interprétation ne s’est pas continué dans des temps plus modernes, et s’il a eu pour objet soit des textes sanscrits anciens, soit des ouvrages composés postérieurement aux époques indiquées tout à l’heure, soit même des livres étrangers à l’Inde. Mais cette recherche elle-même portera des fruits que j’en crois pouvoir attendre ; elle fixera des limites et des indications utiles pour l’histoire encore obscure de la littérature buddhique. J’ajoute que si je ne parle pas ici des lumières que l’examen des versions déjà citées doit répandre sur une autre histoire non moins curieuse, celle de l’émigration et de la propagation du Buddhisme hors de l’Inde, c’est qu’il n’est question en ce moment que de déterminer d’une manière générale quel genre d’autorité s’attache aux livres sanscrits conservés par les Népâlais. Je signalerai plus tard les avantages que l’histoire du Buddhisme indien retirera de l’étude de monuments qui semblent, au premier coup d’œil, appartenir exclusivement à l’histoire extérieure de cette croyance.

L’appréciation du degré d’autorité que possède la collection népâlaise est encore l’objet de la seconde des observations que j’annonçais plus haut. Cette observation, c’est que si les livres buddhiques sont écrits en sanscrit, il résulte de là qu’ils ont été rédigés dans l’Inde. C’est ce qu’affirme en plus d’un endroit M. Hodgson, qui n’hésite pas à conclure de la langue des livres à la contrée où ils doivent avoir été écrits ; et il faut convenir que, présentée ainsi en termes généraux, cette conclusion a par elle-même une grande vraisemblance ; mais quand on examine les choses de plus près, on trouve la question moins simple qu’elle ne paraît l’être au premier abord. La difficulté qu’elle présente vient de ce qu’elle se rattache à une autre question beaucoup plus vaste, celle de l’histoire du Buddhisme indien. Si le Buddhisme avait parcouru toutes les phases de son existence sur un étroit théâtre et dans un court espace de temps, la présomption qu’il a dû être fixé par l’écriture là où s’est parlée la langue qui lui sert d’organe serait à mon sens presque inattaquable. Mais comme le Buddhisme a longtemps vécu dans l’Inde ; comme il a fleuri longtemps aussi dans des contrées voisines, et notamment à l’ouest de l’Indus et dans le Kachemir, la rédaction des livres qu’on est tenté d’abord de regarder comme un fait qui s’est accompli en une fois et dans un seul pays peut s’être opérée en plusieurs fois et dans plusieurs contrées. Ce n’est là qu’une conjecture, et peut-être cette supposition

  1. Analysis of the Dul-va, dans Asiat. Researches, t. XX, p. 42.