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INTRODUCTION À L’HISTOIRE

Quoiqu’il me voie, il n’éprouve pas cette émotion que ressentent toujours les hommes quand ils viennent à se rencontrer ; sans doute il est rassasié par la savoureuse nourriture de la science que lui a procurée l’énergie de la distinction.

Râdhagupta était le premier ministre du roi Açôka. Il vit le vêtement rapiécé du respectable Vîtâçôka et son vase de terre, et dans ce vase une aumône de riz que lui avait donnée Lûha ; et à cette vue s’étant prosterné aux pieds du roi, il lui dit, tenant ses mains réunies en signe de respect : Ô roi, puisque ce Religieux a si peu de désirs et qu’il est satisfait, il faut qu’il ait certainement atteint à son but.

Qu’est-ce qui pourrait causer du plaisir à celui qui n’a pour nourriture que quelques aumônes, pour vêtement que des haillons ramassés dans la poussière, et pour demeure que le voisinage des arbres ?

Celui dont le vaste cœur n’a rien qui l’attache, dont le corps sain est exempt de maladie, et qui dispose à son gré de son existence, celui-là voit pour lui dans le monde des hommes une fête perpétuelle.

Le roi ayant entendu ces stances, s’écria la joie dans le cœur :

En voyant exempt d’orgueil, de hauteur et de trouble ce rejeton de notre race, qui a renoncé à la famille des Mâuryas, à la ville du Magadha et à tous ses biens précieux, il me semble que ma capitale empressée se relève purifiée par la gloire.

Expose-nous donc noblement la loi du Sage aux dix forces. Alors le roi prenant son frère entre ses bras, le fit asseoir sur le siége qui lui était destiné ; puis il lui offrit de sa propre main de la nourriture toute préparée ; enfin, quand il vit qu’il avait terminé son repas, lavé ses mains et mis de côté son vase, il s’assit en face du respectable Vîtâçôka pour entendre la Loi. Alors le respectable Religieux voulant instruire Açôka par un entretien relatif à la Loi, lui dit : Remplis avec attention les devoirs de la puissance royale ; c’est quelque chose de difficile à obtenir que les trois objets précieux ; honore-les constamment, seigneur. Et quand il l’eut réjoui de cette manière par un discours relatif à la Loi, il se retira. Mais Açôka les mains jointes, entouré de ses cinq cents ministres, et accompagné d’un cortége de plusieurs milliers d’habitants de la ville et de la campagne qui l’environnaient avec respect, se mit en devoir de suivre le respectable Vîtâçôka. C’est ce qu’exprime cette stance :

Le frère est suivi par le roi son aîné, qui l’accompagne avec respect ; c’est là un résultat visible et bien digne d’être célébré, de l’adoption de la vie religieuse.

Alors le respectable Vîtâçôka, voulant donner une idée de son mérite, s’élança