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DU BUDDHISME INDIEN.


recueillie. Ce terme barbare est inintelligible, et si, pour l’expliquer, il fallait s’en tenir au sens proposé, nous ne trouverions dans la liste singhalaise que le terme Pattapiṇḍikangga qui défend au Religieux de manger de plus d’un vase, injonction qui rentre certainement dans le cinquième article de M. Rémusat, mais qui n’est pas rendue par le même terme. Heureusement la liste singhalaise a un autre article dont celui qui nous occupe n’est, selon toute apparence, qu’une altération ; c’est Patchtchhâbhattikangga, ou la règle qui ordonne au Religieux de ne faire qu’un repas par jour, et de ne le prendre ni avant ni après midi. Si en effet on rétablit en sanscrit ce mot pâli, on a paçtchâdbhaktika, terme qui ne paraîtra pas très-éloigné de paçvâddhaktim̃ka, si l’on se reporte à la confusion si facile des groupes श्च çtcha ou श्व çva, et द्भ dbha ou द्ध ddha. Il reste khalu, que j’avoue ne pouvoir expliquer ; le sens qu’a ce mot sanscrit (en effet, à savoir) n’a rien à faire ici. Je suis donc encore réduit à proposer une conjecture, et partant de la ressemblance frappante qu’a le groupe स्व sva avec la consonne aspirée kha, je transforme khalu en svâdu, et réunissant ce terme au suivant, je lis le tout svâdvapaçtchâd-bhaktika, c’est-à-dire « celui qui ne mange pas de douceur après son repas, » ou après l’heure de midi, ce qui revient au même. Cette correction, fondée en partie sur l’étude de la liste singhalaise, me paraît mise à peu près hors de doute par l’article sixième de la liste de M. A. Rémusat, qui porte que « le suc des fruits, le miel et autre chose du même genre ne doivent jamais être prises par le mendiant passé midi. » Si même elle était adoptée, elle nous donnerait une expression bien préférable à celle de la liste singhalaise, laquelle en réalité signifie « celui qui mange après, » c’est-à-dire exactement le contraire de ce que défend la règle. Elle me paraît pleinement confirmée par la traduction tibétaine de notre article : Zas-byis mi len-pa, « celui qui ne prend rien après son repas, » en lisant, comme me le propose M. Foucaux, phyis (après) au lieu de byis, qui ne fait aucun sens.

Le septième article est écrit Âraṇyakaḥ ; cette orthographe est exacte, et le mot qu’elle reproduit signifie « celui qui vit dans la forêt, » comme le porte le paragraphe premier de la liste de M. A. Rémusat. Ici encore le Vocabulaire pentaglotte part visiblement d’une source sanscrite ; car en pâli cette injonction est exprimée par âraññakangga. La version tibétaine est entièrement d’accord avec cette explication ; elle représente notre article par les mots : Dgon-pa-pa, « celui qui habite dans la solitude. » En disant que le Religieux doit habiter dans un lieu A lan jo, les Chinois ne font que transcrire le terme sanscrit araṇya.

Le huitième article est écrit Vrikchamûlikaḥ ; c’est le dixième de la liste