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DU BUDDHISME INDIEN.

l’assemblée de Çâkyamuni, à Djêtavana ; puis, après s’être entretenu avec le Buddha sur divers sujets religieux, il se rend à Sukhavatî, pour visiter Amitâbha, le Buddha de cet univers. Le sage Vichkambhin, qui a eu ainsi l’occasion de contempler Avalôkiteçvara, revient encore à son sujet favori, qui est l’énumération des qualités de cet être divin. Çâkyamuni lui raconte alors que du temps de l’ancien Buddha Krakutchanda, il naquit, lui Çâkya, comme Bôdhisattva, sous le nom de Dânaçûra, et que dans ce temps Avalôkiteçvara obtint la possession des modes de méditation les plus élevés. Çâkya apprend ensuite à Vichkambhin l’existence de deux Tîrthas, ou étangs sacrés, situés sur le côté méridional du mont Mêru, qui ont la propriété de rapporter tous les objets qu’on jette dans leurs eaux ; et il compare à leur vertu celle du Karaṇḍa vyûha, qui est le Sûtra même qu’il expose.

Un des interlocuteurs principaux du dialogue change en cet endroit ; et c’est Ânanda, l’un des premiers disciples de Çâkya, qui s’entretient avec son maître sur divers points de la discipline. Çâkyamuni prédit, à l’occasion de cet entretien, que trois cents ans après son entrée dans le Nirvâṇa complet, c’est-à-dire après sa mort, paraîtront dans les monastères buddhiques des Religieux qui violeront les règles imposées par lui à ses Auditeurs, et qui mèneront au sein de la vie ascétique la conduite d’hommes livrés au monde. Çâkya profite de cette circonstance pour exposer les principes de morale et les règles de conduite que doivent observer les Religieux, et c’est par cette exposition qu’il conclut son entretien avec Ânanda.

Là se termine, à proprement parler, l’ouvrage ; mais il faut que les divers narrateurs dans la bouche desquels a été successivement placé ce récit reparaissent chacun à leur tour. Ainsi Upagupta, qui l’a exposé au roi Açôka, reprend la parole pour lui recommander le culte des Trois objets précieux. Açôka lui répond à son tour en lui demandant la raison pour laquelle le Bôdhisattva dont il vient de célébrer les mérites suprêmes se nomme Avalôkiteçvara. Upagupta répond que c’est parce qu’il regarde avec compassion les êtres souffrant des maux de l’existence[1]. Il ajoute à cette explication de nouveaux avis sur le

    de Ceylan et de l’Inde transgangétique. (Mém. de l’Acad. des sciences de S.-Pétersb., t. I, p. 110.) Je montrerai plus tard, en examinant les livres des Buddhistes du Sud, qu’aucun de ceux qui sont à ma disposition ne parle même une seule fois d’Avalôkiteçvara ni de sa formule. Il faut voir pour cette prière les travaux des savants qui se sont le plus occupés du Buddhisme, et en particulier de Klaproth (Nouv. Journ. Asiat., t. VII, p. 185 sqq.), de Schmidt (Mém. de l’Acad. des sciences de S.-Pétersb., t. I, p. 112 sqq.), de Rémusat (Foe koue ki, p. 118), et de Hodgson (Journ. Asiat. Soc. of Bengal, t. IV, p. 196 sqq.).

  1. On voit par là que les Buddhistes du Nord considèrent le nom d’Avalôkiteçvara comme formé de deux mots, un participe et un substantif, savoir, Îçvara, « le seigneur, » et avalôkita,