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INTRODUCTION À L’HISTOIRE
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écritures buddhiques, je n’hésite pas à croire que les Vâipulya sûtras sont postérieurs aux autres, ou en d’autres termes, que les Sûtras simples sont plus près de la prédication de Çâkyamuni que les Sûtras développés.

Les raisons que je puis donner en faveur de ce sentiment sont de deux sortes : les unes, qui sont intrinsèques, résultent de l’étude même des Sûtras ordinaires, comparés aux Sûtras développés ; les autres, qui sont extrinsèques, me sont fournies par quelques faits appartenant à l’histoire générale du Buddhisme indien ; je renvoie l’exposé des secondes à l’histoire de la collection népâlaise et à la comparaison que j’en ferai avec celle de Ceylan, et je m’attache ici uniquement aux premières. Je commencerai par répondre à une objection qu’on voudrait peut-être tirer de la classification tant de fois citée, des écritures buddhiques en trois grandes classes, les Sûtras ou préceptes, le Vinaya ou la discipline, et l’Abhidharma ou la métaphysique. Pourquoi, pourrait-on dire, les Sûtras développés, qui portent déjà, de l’aveu de tout le monde, le titre de Mahâyâna (grand véhicule), n’appartiendraient-ils pas à la classe des livres consacrés à la métaphysique ? Pourquoi ne ferait-on pas des Sûtras les plus simples la classe des véritables Sûtras, la première classe des écritures inspirées ? En un mot, quelle raison empêche de regarder ces livres comme émanés au même degré de la prédication du dernier Buddha, et comme rédigés tous également à la même époque ? Cette raison, je ne crains pas de l’avancer, est celle qui, dans le silence de l’histoire, empêcherait de placer sur le même rang les Lettres de saint Augustin et les Épîtres de saint Paul ; et si l’on s’autorisait, pour repousser cette comparaison qui ne touche qu’à la forme, de ce que saint Augustin cite à tout instant saint Paul, et qu’il ne nous laisse pas un seul moment en doute sur le fait de l’antériorité de l’apôtre à son égard, je dirais que le christianisme de saint Augustin est beaucoup plus le christianisme de saint Paul que le Buddhisme des Sûtras développés n’est celui des Sûtras ordinaires. Je prie en outre le lecteur de peser attentivement la valeur propre de ce titre de Vâipulya Sûtra, ou Sûtra développé, en opposition à celui de Sûtra proprement dit, de Sûtra, en un mot, sans aucune épithète. Si les Sûtras de cette dernière espèce se nommaient quelque part Sûtras abrégés, je concevrais qu’on pût prétendre qu’ils supposent une classe antérieure de livres semblables, dont ils ne seraient que l’extrait. Mais qui oserait jamais avancer, après avoir lu les Sûtras du Divya avadâna et tel des Sûtras développés que l’on choisira, qu’un seul des Sûtras simples soit l’extrait d’un Sûtra vâipulya ? Il me semble bien plus naturel de conclure de cette qualification même de développé que les traités qui la portent se distinguent des autres Sûtras par le développement des matières qui y sont contenues. Rien n’est plus exact en