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INTRODUCTION À L’HISTOIRE

(la salle située au sommet de l’édifice). Alors Bhagavat s’étant habillé avant midi, après avoir pris son manteau et son vase, entra dans Vâiçâlî pour recueillir des aumônes, et après avoir parcouru la ville dans ce dessein, il prit son repas. Quand il eut mangé, il cessa de ramasser des aumônes ; et ayant rangé son vase et son manteau, il se rendit au lieu où était situé le Tchâpâla tchâitya[1], et après y être arrivé, il chercha le tronc d’un arbre, et s’assit auprès pour y passer la journée. Là il s’adressa ainsi au respectable Ânanda : Elle est belle, ô Ananda, la ville de Vâiçâlî, la terre des Vrĭdjis ; il est beau le Tchâitya tchâpâla, celui des Sept manguiers, celui des nombreux garçons, le figuier de Gâutama, le bois des Çâlas, le lieu où l’on dépose son fardeau, le Tchâitya où les Mallas attachent leur coiffure[2]. Il est varié le Djambudvîpa[3] ; la vie y est douce pour les hommes. L’être, quel qu’il soit, ô Ânanda, qui a recherché, compris, répandu les quatre principes de la puissance surnaturelle, peut, si on l’en prie, vivre soit durant un Kalpa entier, soit jusqu’à la fin du Kalpa[4]. Or, Ânanda, les quatre principes de la puissance surnaturelle appartiennent au Tathâgata ; ce sont : 1o la faculté de produire telle ou telle conception, pour détruire la méditation du désir ; 2o la

    exactitude. (Journ. As. Soc. of Bengal, t. VII, p. 991 sqq.) On trouvera que le Sutta pâli est plus étendu et plus riche en détails intéressants ; mais il ne faudrait pas conclure de là que les Buddhistes du Nord ont perdu le souvenir des événements qui font le sujet de ce morceau. Si nous possédions en sanscrit les volumes de la Bibliothèque tibétaine intitulés Mahâ parinirvâṇa sûtra [Csoma, Asiat. Res., t. X, p. 487), nous y retrouverions, sans aucun doute, toutes les circonstances racontées dans le Sutta pâli. On peut déjà voir combien les livres tibétains renferment de détails précieux sur la mort de Çâkyamuni, en lisant le grand et beau fragment extrait par Csoma de Cörös du tome XI du Dul-va, et traduit avec ce soin qu’il a porté dans tous ses travaux. (Asiat. Res., t. XX, p. 309 sqq.) Je n’ai pu retrouver dans la collection de M. Hodgson l’original de ce passage ; mais je n’en reste pas moins intimement convaincu que le récit tibétain du Dul-va est la version littérale d’un texte primitivement rédigé en sanscrit.

  1. Le mot Tchâitya est un terme d’un sens assez étendu que j’ai cru devoir conserver ; il désigne tout lieu consacré au culte et aux sacrifices, comme un temple, un monument, un lieu couvert, un arbre où l’on vient adorer la divinité. Dans ce Sûtra, dont les données sont contemporaines de l’établissement du Buddhisme, il n’est certainement pas question de ces Tchâityas purement buddhiques, ou de ces monuments nommés à Ceylan Dhâtu gabbhas (Dâgabs), qu’on élève au-dessus des reliques d’un Buddha ou de quelque autre personnage illustre. Voilà pourquoi l’ancien commentateur du Parinibbâṇa sutta avertit que les Tchâityas des Vadjdjis (Vrĭdjis) ne sont pas des édifices buddhiques. (Turnour, Journ. As. Soc. of Bengal, t. VII, p. 994.)
  2. Ce lieu est cité dans le Sutta pâli rappelé tout à l’heure, et M. Turnour le désigne comme la salle du couronnement des Mallas. (Journ. As. Soc. of Bengal, t. VII, p. 1010.)
  3. On sait que le Djambudvîpa est un des quatre continents en forme d’îles dont les Buddhistes, imitant ici les Brahmanes, croient la terre composée ; c’est pour eux le continent indien. (A. Rémusat, Foe koue ki, p. 80 sqq.)
  4. Ce mot, qui signifie « la durée d’une période du monde, » est encore une notion qui est commune aux Buddhistes et aux Brahmanes. On peut voir, sur les diverses espèces de Kalpas et sur leur durée, un Mémoire spécial de M. A. Rémusat (Journ. des Sav., année 1831, p. 716 sqq.), et surtout l’exposé que M. Schmidt a fait de la théorie des Kalpas (Mém. de l’Acad. de S.-Pétersb., t. II, p. 58 sqq.).