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autre vieille connaissance de ses jeunes années, un caporal qui avait pris sa retraite à la campagne. Il revit le vieux soldat appuyé à la barrière qui servait d’enclos à son cottage, une béquille sous un bras, sa pipe favorite au coin des lèvres toujours malicieuses ; c’était bien le caporal, en personne. Perché sur les traverses de la barrière, dans un demi-sommeil, les oreilles ramenées contre la tête, les yeux fermés, se voyait un chat : pauvre Jacqueline ! Non, ce n’était plus Jacqueline ; la mort n’épargne ni les rois ni les chats, mais tes vertus étaient passées dans ton petit-fils. Et comme l’âge mène au radotage, ton petit-fils était aimé plus que toi-même du digue caporal. Puisse ta race, ô Jacqueline, durer longtemps ! À cette heure elle n’est point encore éteinte, la nature frappe rarement de stérilité la gent féline : elle l’a faite essentiellement pour l’amour et pour les doux soucis de l’amour, et la dynastie du chat dépasse en durée une dynastie impériale.

Au bruit des fers à cheval, le caporal tourna la tête, regarda longuement et attentivement le cavalier, qui ralentissait son allure, et mettant son cheval au pas, s’approchait de la barrière.

— Grand Dieu ! murmura le caporal, pour un bel homme, voilà un bel homme ! il est de ma taille ou peu s’en faut.

Un sourire, mais un sourire languissant parut sur les lèvres du cavalier, pendant qu’il considérait le digne caporal.

— Il me lorgne de près, se dit celui-ci. Cependant il n’a pas l’air de me reconnaître. Il