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où l’autre mêlait la défiance et la crainte avec l’intérêt et une admiration compatissante.

Ce même soir, avant qu’on apportât les lumières, mon père se tourna vers moi et me demanda brusquement si j’avais vu mon ami, et ce qu’il comptait faire.

« Il compte retourner dans sa famille, » répondis-je.

Roland, qui avait paru s’endormir, tressaillit avec inquiétude.

« Qui est-ce qui retourne dans sa famille ? demanda le capitaine.

— Il faut que vous sachiez, dit mon père, que Sisty a pêché un ami sur le compte duquel il n’est pas en état de donner des renseignements capables de satisfaire un policeman, et qu’il croit cependant devoir protéger.

— Vous êtes heureux, Sisty, qu’il ne vous ait pas vidé les poches ; mais j’ose dire qu’il l’a fait. Quel est son nom ?

— Vivian, Francis Vivian.

— Un beau nom, un nom de Cornouailles, dit mon père. Les uns le font venir des Romains : Vivianus ; les autres d’un mot celtique qui signifie…

— Vivian ! interrompit Roland, Vivian ! je me demande si c’est le fils du colonel Vivian.

— C’est certainement le fils d’un homme comme il faut, répliquai-je ; mais il ne m’a jamais rien dit de sa famille ni de ses parents.

— Vivian, répéta mon oncle, pauvre colonel Vivian ! Ainsi le jeune homme retourne auprès de son père. Je ne doute pas que ce ne soit le même. Ah !

— Que savez-vous du colonel Vivian, ou de son fils ? lui demandai-je. Dites-le-moi, je vous prie ; je m’intéresse tant à ce jeune homme !

— Je ne sais rien ni de l’un ni de l’autre que par les bruits qui courent, répondit mon oncle avec un peu d’humeur. J’ai entendu dire que le colonel Vivian, un excellent officier et un homme d’honneur, avait eu… »

Ici la voix de Roland fut prise d’un tremblement douloureux.

« Avait eu beaucoup de chagrin à cause de son fils, qu’il avait détourné, presque encore enfant, d’un mariage déshonorant, et qui avait fui la maison paternelle pour aller en Amé-