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PADOUE


Padoue est morne. Même dans ses rues animées, on sent, toutes proches, les immenses places solitaires, poudreuses, que tout à l’heure on traversera sous le soleil.

Et quand on les traverse — combien elles sont immobiles et silencieuses ! — quand on les traverse on a peine à croire que là, où rien ne bouge, sinon cette poussière jaune et qui semble lasse, tant de gens aient travaillé, pensé, se soient tant battus.

L’histoire de Sismondi m’a persuadée que, pendant le Moyen Âge, les Vénitiens, ou d’autres personnes, prenaient Padoue une fois par an, — au moins — passaient tous ses habitants « au fil de l’épée », détruisaient toutes ses maisons et s’en allaient pour revenir bientôt recommencer l’opération. Comment on retrouvait sans cesse des Padouans à occire, une Padoue à détruire, je ne l’ai jamais pu comprendre ; mais enfin je sais avec certitude qu’on s’est furieusement battu à Padoue, et, aussi, copieusement massacré entre soi. Peut-être les grandes places dorment-elles pour se reposer de tels souvenirs.