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Des idées complètement fausses se sont malheureusement accréditées, depuis bien des années déjà, sur le peu d’importance et le défaut de solidité de l’édifice qui contient les collections de la Bibliothèque. Habitué à ne voir de ce monument que la muraille triste et monotone dont l’aspect délabré assombrit la portion la plus animée de la rue Richelieu, le public s’est facilement laissé persuader que le renversement d’une pareille construction était un des principaux embellissements à exécuter au centre de Paris. Mais derrière ce mur, qu’on a plâtré et défiguré, comme si l’on se fût proposé de lui donner la physionomie la plus repoussante, se trouve, avec ses vastes cours, son architecture noble et sévère, ses façades sculptées, l’ancien palais Mazarin, c’est-à-dire la plus considérable que nous ayons conservée de ces anciennes habitations dont la splendeur rappelait si bien les mœurs élégantes et polies de la société française au xviie siècle. Dès la porte, se montrent de toutes parts sur les boiseries, sur les ferrures, sur les consoles, les étoiles et les faisceaux, emblèmes héraldiques du cardinal fondateur. Des portiques, dans lesquels il serait facile de rétablir de larges voies de communication, environnent une partie de la cour d’honneur. Un escalier en pierre, de dimensions grandioses, encore garni de sa rampe en fer travaillée avec cet art merveilleux dont le xviie siècle nous a laissé tant de précieux modèles, monte aux salles du premier étage. Ces salles se font toutes remarquer par leur étendue, par la convenance de leur appropriation et par la beauté des corps de bibliothèque en boiserie sculptée dont leurs murailles sont revêtues. Pour ne citer que les plus importantes, nous signalerons à votre attention, Monsieur le Ministre, dans la partie de l’édifice affectée au département des manuscrits, plusieurs chambres à plafonds peints, et la grande galerie dite Mazarine, dont la voûte est encore entièrement décorée de fresques exécutées par le célèbre Romanelli. Cette galerie, la plus vaste de Paris après celle du Louvre, est, à elle seule, un monument des plus rares et des plus complets. Bâtie par François Mansard, l’un des plus grands artistes que la France ait produits, elle se présente au dehors avec des murs élégamment appareillés en briques et en pierre, des ouvertures encadrées de refends, un attique chargé de faisceaux croisés, et un de ces grands combles à la française, dont la proportion seule suffit pour attester tout le talent d’un architecte. Au dedans, ce sont des par-