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DE L’ASIE FRANÇAISE

d’autres encore — se trouvaient justifiés et l’attachement que nous inspire notre grande colonie, et la confiance que nous avons mise en elle, et les sacrifices de toute nature nous ne lui avons pas marchandés. (Applaudissements.)

Nous savions tout cela. Mais lorsque, avec l’autorité qui lui appartient, et avec une conviction profonde, son gouverneur général vient ici les mains pleines de renseignements précis, de chiffres et de faits probants et qu’il nous ouvre, comme il l’a fait tout à l’heure, les plus vastes horizons, il réjouit notre patriotisme et, avec ce don particulier qui lui est propre, il nous communique, comme il le fait à tous ses collaborateurs, à tous ses agents et à son entourage, quelque chose de la confiance, de l’ardeur et du feu sacré qui l’animent. (Vifs applaudissements.)

Je ne serai contredit par personne, ni ici, ni ailleurs, je serai au contraire, j’en suis sûr, votre interprète à tous en proclamant que dans les résultats obtenus et dans le succès incontesté d’une de nos plus vastes entreprises coloniales, l’action personnelle de M. Doumer a été considérable. (Nouveaux applaudissements.)

Il a ainsi dignement continué l’œuvre de ses éminents prédécesseurs ; ce qui prouve, Messieurs, que la France toutes les fois qu’elle veut bien poursuivre avec fermeté une tâche conçue avec prévoyance, est assurée de rencontrer des hommes de talent et de cœur pour l’accomplir. (Très bien ! Très bien ! )

Messieurs, il vous sera peut-être aussi agréable, dans cette réunion éminemment coloniale, d’apprendre qu’une autre de nos grandes colonies, Madagascar, nous donne un égal sujet de satisfaction. (Nombreux et vifs applaudissements.) Tout va très bien là-bas. Vous avez su que cette grande route de Tananarive à Tamatave était achevée, et que déjà les voitures et même les automobiles la sillonnent : admirable travail qui fait le plus grand honneur au Génie, qui l’a exécuté, et en particulier à M. le colonel Roques. (Applaudissements.)

Il en est de même de la route de Tananarive à Majunga, qui sera livrée à la circulation demain, si ce n’est pas fait à l’heure où je parle. Les travaux du chemin de fer ont commencé, amenant partout, comme je le disais dernièrement à la Chambre, sur ce vaste chantier, l’activité, le mouvement et la vie.

Et quand on pense que, dans le moment même où s’accomplissent et se poursuivent de si grands travaux, M. le général Gallieni n’a pas hésité, par la plus noble des initiatives, à abolir la corvée et à détruire ainsi ce dernier vestige de l’esclavage, il faut bien reconnaitre que la France, en Indo-Chine comme à Madagascar, est fidèle à sa mission et à son génie (Vifs applaudissements), et qu’elle montre à l’Europe ce dont elle est capable et comme puissance militaire, politique et coloniale, et comme puissance libérale et émancipatrice. (Nouveaux applaudissements.)

Ah ! Messieurs, c’eût été pour nous une bien bonne fortune si, ce soir, nous avions pu voir, assis à cette table hospitalière, M. le gouverneur général Doumer. (Très bien ! Très bien ! )

J’aurais voulu voir aussi parmi nous un autre de nos gouverneurs généraux que je ne veux pas oublier, âme généreuse et et cœur intrépide, M. Ballay. (Vifs applaudissements.) Pour vaincre sa modestie et pour le déterminer à échanger son gouvernement bienfaisant et paternel de la Guinée contre le gouvernement beaucoup plus vaste de l’Afrique occidentale, il a fallu qu’il y vît un péril, et par conséquent son devoir. (Applaudissements répétés.)

Oh ! alors, il n’a plus hésité, et, depuis, il applique sur un théâtre agrandi ses méthodes sages, humaines et libérales qui ont rendu, dans tout notre continent africain, son nom si justement populaire et respecté. (Nouveaux applaudissements.)

Messieurs, dans une pensée que vous apprécierez sans doute, vous voudrez bien permettre au ministre des colonies, si fier de ses collaborateurs, d’associer dans un même toast, dans de mêmes félicitations et dans de communes espérances les trois noms de MM. Doumer, Gallieni et Ballay. (Bravos et applaudissements prolongés.)

LE PROGRAMME DU BULLETIN


Malgré les difficultés et les tâtonnements inséparables d’un début, nous avons tenu à publier ce premier numéro dans la forme générale et avec les divisions que notre Bulletin devra conserver dans l’avenir.

En tête, après les indications relatives aux progrès et aux travaux du Comité, nous publierons les articles spéciaux que les circonstances commanderont, les relations des missions et les cartes. Dans cette partie du Bulletin figureront également tous les documents indispensables à ceux qui veulent suivre d’un peu près les affaires asiatiques : le texte des arrangements internationaux qui pourront intervenir ; celui des discours d’hommes d’État indiquant nettement l’orientation de la politique de leur pays ; c’est-à-dire un compte rendu aussi complet que possible des débats du Parlement français sur les affaires d Asie, et même de ceux des Parlements étrangers, chaque fois qu’ils prendront une certaine ampleur.

La seconde partie de notre Bulletin sera consacrée à la chronique régulière des différents pays.

Dans cette chronique nous aurons d’abord à résumer, à coordonner à la fin du mois, sous une forme aussi claire et succincte que possible, les événements politiques que les journaux annoncent et commentent, mais par fragments, dans l’ordre dispersé, inévitable pour la presse quotidienne, même la meilleure, et qui impose un véritable effort au lecteur désireux de se faire des vues d’ensemble.

Nous aurons aussi, pour travailler à l’œuvre du Comité, telle que son président, M. Étienne, l’a définie en tête de ce premier Bulletin, à faire aux informations économiques, que l’on ne trouve réunies pour ainsi dire nulle part et sans lesquelles il est cependant impossible de suivre l’évolution profonde des faits, une place aussi large que possible dans notre chronique des pays d’Asie. Cette place devra aller en grandissant : nous ne saurions en effet prétendre, en une matière aussi difficile et aussi complexe, avoir dès le début les sources éprouvées et la certitude que nous pouvons espérer pour l’avenir.

Dans les dernières pages du Bulletin, nous donnerons un compte rendu des ouvrages français et étrangers qui seront publiés sur l’Asie. Et, enfin, nous publierons les indications relatives au personnel de nos colonies et de notre armée sur le continent asiatique.

LA POLITIQUE DE LA FRANCE
DANS LA CHINE MÉRIDIONALE


Depuis la guerre sino-japonaise, mais surtout depuis le coup de force de Kiao-tchéou en 1897, la politique des Puissances en Chine oscille sans cesse entre le principe des sphères d’influence, dont l’application dernière serait certainement le partage, et le principe de la « porte ouverte ». D’après ce dernier, les Puissances doivent se concerter pour sauvegarder l’intégrité territoriale de la Chine tout en s’arrangeant de manière que ce pays soit ouvert aussi entièrement que possible à l’activité économique de tous les étrangers, sans distinction. Il