Page:Buies - Récits de voyages, 1890.djvu/117

Cette page a été validée par deux contributeurs.
119
sur les grands lacs

pête sur les lacs sans qu’elle soit invariablement accompagnée ou suivie de désastres. Les navigateurs des lacs s’aventureront par des temps qui épouvanteraient le plus hardi marin d’eau salée : ils prendront des chargements à bord de vaisseaux qui peuvent à peine tenir la mer par le temps le plus calme, et la plupart de ces vaisseaux voyagent bien plus durant la saison dangereuse que durant la belle saison de l’année. C’est parce que les mois d’octobre et novembre sont ceux qui donnent le plus de profits aux maîtres de bâtiments, ceux pendant lesquels les cargaisons sont les plus fortes et les prix de transport les plus élevés. Les expéditions de grains sont plus actives vers la fin de la navigation ; à cette époque-là, tout bateau qui peut seulement flotter est sûr de ne pas manquer de fret, la saison de la navigation étant très courte sur les lacs, l’hiver hâtif et le printemps tardif ; les glaces s’y forment vite et disparaissent lentement ; l’affréteur n’a donc qu’une seule idée, qui est de mettre à profit chaque heure du jour, et, quoiqu’il soit exposé à voir surgir d’un moment à l’autre des tempêtes violentes, il ne prend aucune des précautions qui pourraient retarder son départ de quelques instants.