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feu ; il est combustible, et dès lors il ne peut provenir que d’une matière d’essence combustible ; et, comme la terre végétale est le magasin général qui seul contient toutes les matières inflammables ou combustibles, on doit penser qu’il en tire son origine et même sa substance.

Le diamant ne laisse aucun résidu sensible après sa combustion : c’est donc, comme le soufre, un corps plus igné que la pyrite, mais dans lequel nous verrons que la matière du feu est fixée par un intermède plus puissant que tous les acides.

La force d’affinité qui réunit les parties constituantes de tous les corps solides est bien plus grande dans le diamant que dans la pyrite, puisqu’il est beaucoup plus dur ; mais, dans l’un et dans l’autre, cette force d’attraction a, pour ainsi dire, sa sphère particulière et s’exerce avec tant de puissance qu’elle ne produit que des masses isolées qui ne tiennent point aux matières environnantes, et qui toutes sont régulièrement figurées : les diamants, comme les pyrites, se trouvent dans la terre limoneuse ; ils y sont toujours en très petit volume, et ordinairement sans adhérence des uns aux autres, tandis que les matières uniquement formées par l’intermède de l’eau ne se présentent guère en masses isolées ; et en effet, il n’appartient qu’au feu de se former une sphère particulière d’attraction dans laquelle il n’admet les autres éléments qu’autant qu’ils conviennent ; le diamant et la pyrite sont des corps de feu dans lesquels l’air, la terre et l’eau ne sont entrés qu’en quantité suffisante pour retenir et fixer ce premier élément.

Il se trouve des diamants noirs presque opaques, qui n’ont aucune valeur et qu’on prendrait au premier coup d’œil pour des pyrites martiales octaèdres ou cubiques ; et ces diamants noirs forment peut-être la nuance entre les pyrites et les pierres précieuses qui sont également des produits de la terre limoneuse : aucune de ces pierres précieuses n’est attachée aux rochers, tandis que les cristaux vitreux ou calcaires, formés par l’intermède de l’eau, sont implantés dans les masses qui les produisent, parce que cet élément, qui n’est que passif, ne peut se former comme le feu des sphères particulières d’attraction. L’eau ne sert en effet que de véhicule aux parties vitreuses ou calcaires qui se rassemblent par leur affinité, et ne forment un corps solide que quand cette même eau en est séparée et enlevée par le desséchement ; et la preuve que les pyrites n’ont admis que très peu ou point du tout d’eau dans leur composition, c’est qu’elles en sont avides au point que l’humidité les décompose et rompt les liens du feu fixé qu’elles renferment. Au reste, il est à croire que, dans ces pyrites qui s’effleurissent à l’air, la quantité de l’acide étant proportionnellement trop grande, l’humidité de l’air est assez puissamment attirée par cet acide pour attaquer et pénétrer la substance de la pyrite, tandis que, dans les marcassites ou pyrites arsenicales qui contiennent moins d’acide, et sans doute plus de feu que les autres pyrites, l’humidité de l’air ne fait aucun effet sensible : elle en fait encore moins sur le diamant que rien ne peut dissoudre, décomposer ou ternir, et que le feu seul peut détruire en mettant en liberté celui que sa substance contient en si grande quantité, qu’elle brûle en entier sans laisser de résidu.

L’origine des vraies pierres précieuses, c’est-à-dire des rubis, topazes et saphirs d’Orient, est la même que celle des diamants. Ces pierres se forment et se trouvent de même dans la terre limoneuse ; elles y sont également en petites masses isolées ; le feu qu’elles renferment est seulement en moindre quantité, car elles sont moins dures et en même temps moins combustibles que le diamant, et leur puissance réfractive est aussi de moitié moins grande. Ces trois caractères, ainsi que leur grande densité, démontrent assez qu’elles sont d’une essence différente des cristaux vitreux ou calcaires, et qu’elles proviennent, comme le diamant, des extraits les plus purs de la terre végétale.

Dans le soufre et les pyrites, la substance du feu est fixée par l’acide vitriolique ; on pourrait donc penser que, dans le diamant et les pierres précieuses, le feu se trouve fixé de même par cet acide le plus puissant de tous ; mais M. Achard a, comme nous l’avons