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tion. D’autres zéolithes contiennent les mêmes matières, mais dans des proportions différentes. Nous devons observer, au reste, que ce n’est qu’avec la zéolithe la plus blanche et la plus pure, telle que celle de Féroë, que l’on peut obtenir un verre blanc et transparent ; toutes les autres zéolithes donnent un émail coloré spongieux et friable, qui ne devient consistant et dur qu’en continuant le feu et même l’augmentant après la fusion. M. Pott a observé que la zéolithe fournissait une assez grande quantité d’eau ; ce qui prouve encore le mélange de la matière calcaire qui, comme l’on sait, donne toujours de l’eau quand on la traite au feu. M. Bergman a fait la même observation, et ce savant chimiste en conclut avec raison que cette pierre n’a pas été produite par le feu, comme certains minéralogistes l’ont prétendu, parce qu’on ne l’a jusqu’ici trouvée que dans des terrains volcanisés M. Faujas de Saint-Fond, qui connaît mieux que personne les matières produites par le feu des volcans, loin d’y comprendre la zéolithe, dit au contraire expressément que toutes les zéolithes contenues dans les laves ont été saisies par ces verres en fusion ; qu’elles existaient auparavant telles que nous les y voyons, et qu’elles n’y sont que plus ou moins altérées par le feu qui, néanmoins, n’était pas assez violent pour les fondre[1].

La zéolithe de Féroë est communément blanche, et quelquefois rougeâtre lorsqu’elle est couverte et mélangée de parties ferrugineuses réduites en rouille. Cette zéolithe blanche est plus dure que le spath, et cependant elle ne l’est pas assez pour étinceler sous le choc de l’acier ; elle est ordinairement cristallisée en rayons divergents et paraît être la plus pure de toutes les pierres de cette sorte ; car il s’en trouve d’autres en plus gros volume et plus grande quantité qui ne sont pas cristallisées régulièrement et dont les formes sont très différentes, globuleuses, cylindriques, coniques, lisses ou mamelonnées, mais presque toutes ont le caractère commun de présenter dans leur texture des rayons qui tendent du centre à la circonférence : je dis presque toutes, parce que j’ai vu entre les mains de M. Faujas de Saint-Fond une zéolithe cristallisée en cube, qui paraît être composée de filets ou de petites lames parallèles. Ce savant et infatigable observateur a trouvé cette zéolithe cubique à l’île de Staffa, dans la grotte de Fingal : on sait que cette île, ainsi que toutes les autres îles Hébrides au nord de l’Écosse, sont, comme l’Islande, presque entièrement couvertes de produits volcaniques, et c’est surtout dans l’île de Mult que les zéolithes sont en plus grande abondance ; et comme jusqu’ici on n’a rencontré ces pierres que dans les terrains volcanisés[2], on paraissait fondé à les regarder comme les produits du feu. Il en a ramassé plusieurs autres dans les terrains volcanisés qu’il a parcourus, et, dans tous les échantillons qu’il m’en a montrés, on peut reconnaître clairement que cette pierre n’a pas été produite par le feu et qu’elle a seulement été saisie par les laves en fusion dans lesquelles elle est incorporée, comme les agates, cornalines, calcédoines, et même les spaths calcaires qui s’y trouvent tels que la nature les a produits avant d’avoir été saisis par le basalte ou la lave qui les recèle.


  1. Minéralogie des Volcans, par M. Faujas de Saint-Fond, in-8o ; Paris, 1784, p. 178 et suiv.
  2. On a trouvé des zéolithes à l’île de Féroë, à celle de Staffa, en Islande, en Sicile autour de l’Etna, à Rochemore, dans les volcans éteints du Vivarais, et on en a aussi rencontré dans l’île de Bourbon.