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fer coulé excellent qui se moule très bien ; mais que jamais ils ne sont parvenus à en faire un bon fer forgé[1].

Au reste, il y a des charbons qu’il serait peut-être plus avantageux de lessiver à l’eau que de cuire au feu pour les réduire en coaks. M. de Grignon a proposé de se servir de cette méthode, et particulièrement pour le charbon d’Épinac ; mais M. de Limare pense au contraire que le charbon d’Épinac, n’étant que pyriteux, ne doit pas être lessivé, et qu’il n’y a nul autre moyen de l’épurer que de le préparer en coak ; la lessive à l’eau ne pouvant servir que pour les charbons chargés d’alun, de vitriol ou d’autres sels qu’elle peut dissoudre, mais non pas pour ceux où il ne se trouve que peu ou point de ces sels dissolubles à l’eau.

Le charbon de Montcenis, quoi qu’a peu de distance de celui d’Épinac, est d’une qualité différente : il faut l’employer au moment qu’il est tiré, sans quoi il fermente bientôt et perd sa qualité ; il demande à être désoufré par le moyen du feu, et l’on a nouvellement établi des fourneaux et des hangars pour cette opération.

Le charbon de Rive-de-Gier, dans le Lyonnais, est moins bitumineux, mais en même temps un peu pyriteux, et en général il est plus compact que celui de Montcenis : il est d’une grande activité ; son feu est âpre et durable ; il donne une flamme vive, rouge et abondante ; son poids est de cinquante-quatre livres le pied cube, lorsqu’il est désoufré ; et dans cet état il pèse autant que le charbon brut de Saint-Chaumont, qui, quoique assez voisin de celui de Rive-de-Gier, est d’une qualité très différente, car il est friable, léger, et à peu près de la même nature que celui de Montcenis, à l’exception qu’il est un peu moins pyriteux ; il ne pèse cru que cinquante-quatre livres le pied cube, et ce poids se réduit à trente-six lorsqu’il est désoufré.

  1. De quelque manière que le charbon de terre ait été torréfié, soit qu’il l’ait été à l’air libre, soit qu’il l’ait été dans des fosses comme à Newcastle, ou dans des fourneaux comme à Sultzbach, l’expérience ne lui a encore été avantageuse que pour les ouvrages qui se jettent en moule : dans les grandes opérations métallurgiques, ce charbon, si l’on veut suivre l’idée commune, n’est pas encore suffisamment désoufré ; les braises qu’il donne ne remplissent pas à beaucoup près le but qu’on se propose : le fer provenant des forges de Sultzbach, et qui, porté à la filière, se trouvait une fonte grise et fort douce, a été reconnu être le produit de plusieurs affinages ; en total, la fonte du fer qu’on obtient avec leur feu a toujours deux défauts considérables : on convient d’abord généralement que la qualité du fer est avilie, qu’il est cassant et hors d’état de rendre beaucoup de service. Dans la quantité de métal fondu au feu de charbon de terre, cru ou converti en braise, il se trouve toujours un déchet considérable ; dans une semaine on avait fondu à Lancashire, avec le seul charbon de bois, quinze ou seize tonnes de fer (la tonne pèse deux mille), et avec les houilles on n’en a eu que cinq ou six.

    Cet inconvénient se remarque également pour toutes les autres espèces de mines : un fourneau de réverbère anglais, chauffé avec le bois de hêtre, même avec des fagots, fait rendre à la mine de plomb dix pour cent de plus que lorsqu’on le chauffe avec le charbon de terre.

    Depuis plus de quarante ans on a commencé à vouloir l’employer, mais inutilement, pour la mine de cuivre : il y a vingt-huit ans qu’on avait encore voulu essayer en France, dans le travail d’une mine de cuivre, d’introduire l’usage du charbon de terre, tant pour le grillage que pour la fonte du minéral ; on le mettait sur du bois dans le grillage, et on en mêlait neuf parties avec une partie de charbon de bois dans le fourneau allemand pour la fonte : une portion de cuivre, traitée de cette manière, s’est trouvée détruite et a causé des pertes considérables qui ont obligé les entrepreneurs d’abandonner cette fabrication. Du charbon de terre, par M. Morand, p. 1186 et 1187. — Ces observations de M. Morand paraîtraient d’abord contredire ce que nous avons cité d’après M. Jars ; mais, comme ces dernières expériences ont été faites avec du charbon cru, et que les autres avaient été faites avec des charbons épurés en coaks, leurs résultats devaient être différents.