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Enfin, on en a rencontré autour des îles de la mer du Sud[1], et ce qui a paru digne de remarque, c’est qu’en général les vraies et belles perles ne sont produites que dans les climats chauds, autour des îles et près des continents, et toujours à une médiocre profondeur ; ce qui semblerait indiquer qu’indépendamment de la chaleur du globe, celle du soleil serait nécessaire à cette production, comme à celle de toutes les autres pierres précieuses. Mais peut-être ne doit-on l’attribuer qu’à l’existence des vers qui percent les coquilles, dont les espèces ne se trouvent probablement que dans les mers chaudes, et point du tout dans les régions froides et tempérées : il faudrait donc un plus grand nombre d’observations pour prononcer sur les causes de cette belle production, qui peuvent dépendre de plusieurs accidents dont les effets n’ont pas été assez soigneusement observés.


TURQUOISES

Le nom de ces pierres vient probablement de ce que les premières qu’on a vues en France ont été apportées de Turquie ; cependant ce n’est point en Turquie, mais en Perse qu’elles se trouvent abondamment[2], et en deux endroits distants de quelques lieues l’un

    point d’avertir les plongeurs en secouant une corde qu’ils ont autour du corps ; souvent un caporal se jette lui-même dans les flots, armé d’un couteau, pour secourir le plongeur qu’il voit en danger ; mais ces précautions n’empêchent pas qu’il n’en périsse toujours quelques-uns, et que d’autres ne reviennent estropiés d’un bras ou d’une jambe. Jusqu’à présent tout ce qu’on a pu inventer pour mettre les pêcheurs à couvert a mal réussi. Les perles de Panama sont ordinairement de très belle eau ; il s’en trouve de remarquables par leur grosseur et leur figure. Une partie est transportée en Europe, mais la plus considérable passe à Lima, où elles sont extrêmement recherchées, ainsi que dans les provinces intérieures du Pérou. Histoire générale des Voyages, t. XIII, p. 277. — Autrefois il y avait dans le golfe de Manta, dans le corrégiment de Guayaquil au Pérou, une pêche de perles, mais la quantité de monstres marins qui s’y trouvent a fait abandonner la pêche de ces perles. Idem, ibidem, p. 366.

  1. On trouve des perles et des huîtres sur les côtes de l’île d’Otaïti. Voyage autour du monde, par le commodore Byron, etc., t. Ier, p. 137. — Les femmes d’Uliétéa paraissent faire cas des perles, car on vit une fille qui avait un pendant d’oreille de trois perles, dont l’une était très grosse, mais si terne qu’elle était de peu de valeur ; les deux autres, qui étaient de la grosseur d’un pois moyen, étaient d’une belle forme ; ce qui fait présumer qu’il se trouve des huîtres à perles près de leurs côtes. Voyages du capitaine Cook, etc., t. III, p. 10.
  2. Autrefois les marchands joailliers pouvaient tirer de la Perse quelques turquoises de la vieille roche, mais depuis quinze ou vingt ans il ne s’y en trouve plus, et, à mon dernier voyage, je ne pus en recouvrer que trois qui étaient raisonnablement belles. Pour des turquoises de la nouvelle roche, on en trouve assez, mais on en fait peu d’état, parce qu’elles ne tiennent pas leur couleur, et qu’en peu de temps on les voit devenir vertes. Les six Voyages de Tavernier en Turquie, etc. ; Rouen, 1713, t. II, p. 336. — La turquoise ne se trouve que dans la Perse, et se tire de deux mines, l’une qui se nomme la vieille roche, à trois journées de Meched, au nord-ouest, près du gros bourg de Nichapour ; l’autre qui n’en est qu’à cinq journées et qui porte le nom de la nouvelle roche. Les turquoises de la seconde mine sont d’un mauvais bleu tirant sur le blanc, aussi se donnent-elles à fort bas prix. Mais, dès la fin du dernier siècle, le roi de Perse avait défendu de fouiller dans la vieille roche pour tout autre que pour lui, parce que les orfèvres du pays ne travaillant qu’en fil et n’entendant pas l’art d’émailler sur l’or, ils se servaient pour les garnitures de sabres, de poignarda et d’autres ouvrages, des turquoises de cette mine, au lieu d’émail, en les faisant tailler et