Page:Buffon - Œuvres complètes, éd. Lanessan, 1884, tome III.djvu/590

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Le talc et l’amiante sont également des produits du mica atténué par l’eau, et l’amiante, quoique assez rare, l’est moins que le talc dont la composition suppose une infinité de filaments réunis de très près, au lieu que dans l’amiante ces filets ou filaments sont séparés, et ne pourraient former du talc que par une seconde opération qui les réunirait : aussi le talc ne se trouve qu’en quelques endroits particuliers, et l’amiante se présente dans plusieurs contrées, et surtout dans les montagnes graniteuses où le mica est abondamment répandu ; il y a même d’assez grandes masses d’amiante dans quelques-unes de ces montagnes[1].

On trouve de l’amiante en Suisse, en Savoie[2] et dans plusieurs autres contrées de l’Europe[3] ; il s’en trouve dans les îles de l’Archipel[4] et dans plusieurs régions du continent de l’Asie, en Perse[5], en Tartarie[6], en Sibérie et même en

  1. M. Gmelin vit, en 1741, la montagne d’asbeste ou d’amiante qui se trouve en Sibérie ; elle est située sur le rivage oriental du Tagil : il y avait environ trente ans que la découverte de ce fossile était faite. La pierre de la montagne est molle, friable et de différentes couleurs, bleue, verte, noire, mais le plus souvent toute grise : sa direction est d’ordinaire à l’Orient, et presque perpendiculaire. Les veines d’asbeste ont toutes sortes de directions ; elles ont quelquefois l’épaisseur de deux ou trois lignes, et vont rarement jusqu’à celle d’un pouce : tant qu’on n’en éparpille pas les filaments, la pierre a la couleur d’un verre luisant et verdâtre ; mais pour peu qu’on la touche, il s’en détache un duvet si délié qu’il égale presque la soie la plus fine. Il s’en trouve aussi des veines qui semblent ne pas être mûres, d’autres qui paraissent trop vieilles, ou qui ne sont pas filamenteuses et tombent en poussière au simple attouchement. Entre la véritable pierre d’amiante, il se trouve une autre pierre verte, qui se divise comme l’asbeste en filaments, mais raides et pierreux : cette pierre verte n’est peut-être autre chose qu’un asbeste. Histoire générale des voyages, t. XVIII, p. 453 et 454.
  2. M. de La Condamine a fait voir un paquet d’amiante très blanc, trouvé dans les montagnes de la Tarentaise, nouvelle source jusqu’à présent inconnue de cette espèce de matière minérale. Mémoires de l’Académie des sciences, année 1761, p. 31. Observations de physique générale.
  3. « Il y a en Norvège, dit Pontoppidan, un rocher d’amiante ou d’asbeste, sorte de matière incombustible : la préparation en est simple ; on le macère d’abord dans l’eau, on le bat ensuite pour l’avoir en filaments ; on en dégage les parties terreuses par une rinçure dans l’eau claire, répétée sept à huit fois ; on le fait sécher sur un tamis, et on le file enfin comme du lin, ayant soin de s’humecter les doigts d’huile afin qu’il soit plus souple à l’eau. » Journal étranger, mois de septembre 1755, p. 213 et 214.
  4. On trouve de plus une certaine pierre en grande quantité dans l’île de Chypre (les anciens l’ont appelée amianthus), surtout en un certain village de même nom, qui était autrefois fort connu et fort renommé à cause de la filasse, du fil et des toiles que les habitants en faisaient. Description de l’Archipel, par Dapper, p. 52.
  5. Ce qu’on trouve de plus particulier dans les montagnes du Caboulistan, en deçà de l’Indus, ce sont des mines assez fréquentes d’amiante, dont les habitants savent bien tirer parti. L’amiante, que l’on nomme vulgairement le lin incombustible, est une matière pierreuse, composée de filets déliés comme de la soie, argentés et luisants, qui s’amollissent dans l’huile, et y acquièrent assez de souplesse pour pouvoir être filés. On en fait des cordes et des toiles assez fines pour servir de mouchoirs, lesquels se blanchissent en les jetant dans le feu d’où ils sortent sans que le tissu en soit le moins du monde endommagé. Nous avons aussi quelques mines d’amiante dans les Pyrénées, dans les montagnes de Gênes, etc. Histoire de Thomas Kouli-Kan ; Paris, 1742, in-12.
  6. « Dans la province de Chinchintalas, il y a une montagne dans laquelle il se trouve des salamandres, desquelles, par artifice, ils font du drap de telle propriété, que s’il est jeté au feu il ne brûlera point, et se fait tel drap avec de la terre en cette manière. Ils prennent cette terre qui est entremêlée de petits filets en forme de laine, laquelle ils font dessécher au soleil puis la broyant en un mortier et la lavant, afin que toute la terre s’en