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deviennent même à demi transparents lorsqu’ils sont amincis, ils ont tous la cassure vitreuse, ils font également feu contre l’acier ; ils résistent de même à l’action des acides, en un mot ils présentent toutes les propriétés essentielles aux substances vitreuses.

Mais, comme chacun des verres primitifs a pu fournir son extrait, et que ces différents extraits se sont souvent mêlés pour former les cailloux, soit dans les rochers quartzeux et graniteux, soit dans les terres schisteuses ou argileuses, et que ces mélanges se sont faits à différentes doses, il s’est formé des cailloux de qualités diverses ; la substance des uns contient beaucoup de quartz, et ils sont par cette raison très réfractaires au feu ; d’autres, mêlés de feldspath ou de schorl, sont fusibles ; enfin d’autres, également fusibles, sont mêlés de matières calcaires : on pourra toujours les distinguer les uns des autres, en comparant avec attention leurs propriétés relatives ; mais tous ont la même origine, et tous sont de seconde formation.

Il y a des blocs de pierre qui ne sont formés que par l’agrégation de plusieurs petits cailloux réunis sous une enveloppe commune. Ces blocs sont presque toujours en plus grandes masses que les simples cailloux ; et comme le ciment, qui réunit les petits cailloux dont ils sont composés, est souvent moins dur et moins dense que leur propre substance, ces blocs de pierre ne sont pas de vrais cailloux dans toute l’étendue de leur volume, mais des agrégats, souvent imparfaits, de plusieurs petits cailloux réunis sous une enveloppe commune : aussi leur a-t-on donné le nom particulier de poudingues, pour les distinguer des vrais cailloux ; mais la plupart de ces poudingues ne sont formés que de galets ou cailloux roulés, c’est-à-dire de fragments de toutes sortes de pierres, arrondis et polis par les eaux ; et nous ne traitons ici que les cailloux simples, qui, comme les autres stalactites, ont été produits par la concrétion du suc vitreux, soit dans les cavités ou les fentes des rochers ou des terres, soit dans les coquilles[1], les os ou les bois sur lesquels ce suc vitreux tombait et qu’il pouvait pénétrer.

  1. M. de Mairan étant à Breuilpont, petit village sur la rivière d’Eure, entre Passy et Ivry, observa que tout le terrain, d’une demi-lieue à la ronde, était couvert à sa surface, et même rempli dans son intérieur de pierres qui lui parurent mériter de l’attention… Toutes sont du genre des cailloux, propres à faire feu, couvertes entièrement d’une croûte ou écorce de craie ou de marne. M. de Mairan les a partagées en quatre classes, dont deux sont des pétrifications animales ou faites dans des parties animales, du moins ne peut-il y avoir quelque doute que sur une ; c’est celle qui est composée de pierres de toute grandeur, depuis la grosseur du doigt jusqu’à celle d’une tête de taureau ; les figures en sont fort irrégulières et différentes, mais elles représentent toutes des ossements d’animaux avec leurs cavités, apophyses, épiphyses, etc., et les représentent d’autant mieux qu’elles sont plus entières, car on les trouve cassées pour la plupart ; cette pierre est de beaucoup la plus abondante, et il n’est guère possible que le hasard ait produit entre des pierres et des ossements d’animaux une ressemblance si exacte et tant répétée.

    La seconde classe, la moins nombreuse de toutes, est certainement faite dans des parties animales ; ce sont des échinites, c’est-à-dire des pierres qui se sont moulées dans l’écaille ou coque ou enveloppe de quelque echinus marin ou hérisson de mer ; la figure de cette espèce de poisson, qui est à peu près celle d’un conoïde parabolique, les arêtes, les cannelures de l’écaille, l’arrangement de ses éminences, tout est exactement marqué sur ces pierres ; elles n’ont point de croûte de craie ou de marne, comme toutes les autres de Breuilpont, mais elles sont entièrement cailloux. M. de Mairan en a trouvé quelques-unes fort grandes et qui ont trois pouces de diamètre à la base de leur conoïde, ce qui n’est pas ordinaire ; quoiqu’on soit sûr qu’elles appartiennent toutes à des echinus, il n’est pas toujours aisé de déterminer à quelle espèce particulière d’echinus chacune appartient ; il peut y avoir tel echinus marin, et il y a certainement un très grand nombre d’animaux, et surtout de poissons qui ne se trouvent point dans les naturalistes les plus exacts.

    Il reste les deux autres classes de pierres de Breuilpont qui sont purement minérales : les unes et les autres ont une croûte terreuse ; après quoi vient le caillou, et ensuite un