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Les voyageurs nous apprennent qu’on trouve de très beaux jaspes à la Chine, au Japon, dans les terres de Catai[1], et de plusieurs autres provinces de l’Asie[2]. Ils en ont aussi vu au Mexique[3].

En Europe, l’Allemagne est le pays où les jaspes se trouvent en plus grande quantité : « La Bohème, dit Boëce de Boot, produit de très beaux jaspes rouges, sanguins, pourprés, blancs et mélangés de toutes sortes de couleurs. » On trouve cette pierre en masses assez considérables pour en faire des statues[4]. On connaît aussi les jaspes d’Italie, de Sicile, d’Espagne ; et il s’en trouve dans quelques provinces de France, comme en Dauphiné, en Provence, en Bretagne et dans le pays d’Aunis[5] : c’est peut-être au zinopel ou sinople[6] que l’on doit rapporter ces jaspes grossiers et rougeâtres du pays d’Aunis.


CAILLOUX

Toutes les stalactites ou concrétions vitreuses demi-transparentes sont comprises dans l’énumération que nous avons faite des agates[7], cornalines, sardoines, prases, calcédoines, pierres hydrophanes et pétro-silex, entre lesquelles on trouve sans doute plusieurs nuances intermédiaires, c’est-à-dire des pierres qui participent de la nature des unes et des autres, mais dont nous ne pouvons embrasser le nombre que par la vue de l’esprit, fondée sur ce que, dans toutes ses productions, la nature passe par des degrés insensibles, et des nuances dont il ne nous est possible de saisir que les points saillants et les extrêmes : nous l’avons suivie de la transparence à la demi-transparence dans les matières qui proviennent du quartz, du feldspath et du schorl ; nous venons de présenter les jaspes qui sont entièrement opaques, et il ne nous reste à parler que des cailloux qui sont souvent composés de toutes ces matières mêlées et réunies.

Nous devons observer d’abord que l’on a donné le nom de cailloux à toutes les pierres, soit du genre vitreux, soit du genre calcaire, qui se présentent sous une forme globuleuse, et qui souvent ne sont que des morceaux ou fragments rompus, roulés et arrondis par le frottement dans les eaux qui les ont entraînés : mais cette dénomination, prise uniquement de la forme extérieure, n’indique rien sur la nature de ces pierres, car ce sont tantôt des fragments de marbres ou d’autres pierres calcaires, tantôt des morceaux de schiste, de granit, de jaspe et autres roches vitreuses plus ou moins usés et polis par les frottements qu’ils ont essuyés dans les sables des eaux qui les ont entraînés. Ces pierres s’amoncellent

  1. Voyez l’Histoire générale des voyages, t. XXVII, p. 37 et 307 ; et t. LX, p. 322.
  2. On trouve des jaspes en Phrygie, dans la Thrace, l’Assyrie, la Perse, la Cappadoce, l’Inde et l’île de Chypre, l’Amérique, et en plusieurs endroits de l’Allemagne. Boëce de Boot, liv. ii, p. 250 et 251.
  3. Entre les minéraux, on vante une espèce de jaspe que les Mexicains nomment eztelt, de couleur d’herbe, avec quelques petites taches de sang. Histoire générale des voyages, t. XXVIII, p. 176.
  4. Boëce de Boot, liv. ii, p. 251.
  5. On trouve dans le pays d’Aunis un jaspe grossier qui est une espèce de quartz opaque ; il y en a du rouge avec des veines blanches ; c’est, si l’on veut, du pétro-silex, qui n’est qu’une variété du quartz comme le jaspe. Journal de physique, juillet 1782, p. 47.
  6. Le sinople ou zinopel est une sorte de jaspe rouge d’un grain moins fin, non susceptible de poli et beaucoup plus chargé de fer ; ce métal y est à l’état d’ocre et en assez grande quantité. Lettres de M. le docteur Demeste, t. Ier, p. 401.
  7. Voyez, ci-devant, p. 498 et suiv.