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bon de terre ; c’est du moins celle où l’on a le plus anciennement exploité ces mines, et où on les a fouillées le plus profondément. Nous avons dit que leur direction générale et commune est du levant au couchant : les veines du charbon n’y sont jamais directement en ligne droite, elles s’élèvent et s’abaissent alternativement, suivant la pente du terrain qui leur sert d’assise ; ces veines passent par-dessous les rivières et vont en s’abaissant vers la mer ; les veines que l’on fouille d’un côté d’une rivière ou d’une montagne répondent exactement à celles de l’autre côté : les mêmes couches de terre, les mêmes bancs de pierre, accompagnent les unes et les autres ; le charbon s’y trouve partout de la même espèce. Ce fait a été vérifié plusieurs fois par des sondes, qui ont fait reconnaître les mêmes terres et les mêmes bancs jusqu’à quatre cents pieds de profondeur[1].

    d’un autre côté au jour par une ligne oblique. Toutes les couches du même district, étant toujours parallèles, observent la même loi, et par conséquent les mêmes sauts.

    » On désigne les couches par des noms relatifs à leur position : on les divise en deux espèces principales ; celles qui font un angle avec la ligne horizontale, depuis zéro jusqu’à quarante-cinq degrés, sont appelées veines et pendage de plature, et celles qui font un angle avec la même ligne, depuis quarante-cinq degrés jusqu’à quatre-vingt-dix, veines à pendage de roisse : on les subdivise ensuite en demi-plature, demi-roisse, quart de plature, quart de roisse.

    » Les unes et les autres sont sujettes à un grand dérangement dans leur pente ou inclinaison ; on rencontre souvent des bancs de pierre de quinze à vingt toises d’épaisseur, lesquels coupent depuis la superficie de la terre jusqu’au plus profond où l’on ait été jusqu’à présent, non seulement toutes les couches ou veines de charbon, mais aussi tous les lits de rochers qui se trouvent entre elles ; de façon que, lorsqu’on a traversé un de ces bancs, on retrouve de l’autre côté les mêmes lits et couches correspondantes, qui ne sont plus sur une même ligne horizontale, mais plus hautes ou plus basses : on nomme ces bancs de pierre failles.

    » C’est ordinairement une pierre sablonneuse, espèce de grès, quelquefois moins dur que celui qui compose les lits de rochers : on évite de s’en approcher en exploitant une couche de charbon ; ils fournissent assez souvent beaucoup d’eau, soit parce qu’ils sont poreux, soit aussi parce que toutes les couches supérieures venant s’y terminer laissent du cours à l’eau qu’elles renferment contre leurs parois. On trouve aussi quelquefois dans ces bancs de rochers des rognons de charbon, et même des sacs qui ont quelquefois vingt et trente pieds d’étendue, entourés par le rocher…

    » Tous les rochers qui composent les terrains aux environs de Liège sont une espèce de grès très dur et très compact, qui est placé par couches comme le charbon, et qui les divise… Il en est un autre à grains très fins, qui paraît être un mélange de sable mêlé de mica blanc et lié par une terre argileuse très fine ; celui-ci se décompose facilement à l’air, par feuillets comme un schiste… Celui qui est plus près du charbon que les précédents est d’une couleur noirâtre, quelquefois un peu rougeâtre ; il paraît être composé de sable très fin, réuni par un limon avec lequel il forme un corps dur, mais il s’attendrit et se décompose à l’air : il s’attache à la langue comme la terre à foulon…

    » Le charbon est encore divisé, soit au toit, soit au mur du rocher, par une terre noire schisteuse dure ; elle se décompose aisément à l’air, et ses lits, lorsqu’on les sépare, présentent des empreintes de plantes.

    » Les rochers sont partout à peu près les mêmes, et répétés autant de fois qu’il y a de couches de charbon.

    » Le charbon est d’abord plus ou moins bitumineux, c’est ce qu’on appelle houille grasse ou houille maigre : lorsqu’elle ne contient que très peu de bitume, on la nomme clute… Celle du milieu perd de sa qualité à l’air et s’y décompose en partie… Il y en a d’autres qui, avec les mêmes qualités, sont très pierreuses… Malgré les puits établis pour la circulation de l’air, le feu ne laisse pas de prendre quelquefois aux mouffettes et de faire de fort grands ravages. » Voyages métallurgiques, par M. Jars, p. 288 jusqu’à 297.

  1. Du charbon de terre, par M. Morand, p. 64 et suiv.