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dans leur disposition, elles sont interrompues à une lieue et demie de Liège, mais elles reprennent ensuite dans une disposition presque perpendiculaire, pour continuer de la même manière pendant plusieurs lieues. Au nord de la ville, et au midi de l’autre côté de la Meuse, les veines se prolongent au plus à une demi-lieue, mais toujours dans la direction de l’est à l’ouest… Il y a apparence que ce sont les mêmes couches, quoique leur inclinaison change de distance en distance, tantôt au midi, tantôt au nord. En général, tous les lits de charbon et le rocher sont très irréguliers dans cette partie[1]. »

Ce pays de Liège est peut-être de toute l’Europe la contrée la mieux fournie de char-

  1. Voyages métallurgiques, par M. Jars, p. 28 et 238. — « On a fait, dit le même auteur, une observation remarquable dans le pays de Liège ; elle est assez générale lorsqu’il ne se rencontre aucun obstacle : toute couche de charbon qui paraît à la surface de la terre, au midi, s’enfonce du côté du nord, et va jusqu’à une certaine profondeur en formant un plan incliné, devient ensuite presque horizontale pendant une certaine distance, pour remonter du côté du nord par un second plan incliné jusqu’à la surface de la terre, et cela dans un éloignement de son autre sortie, proportionné à son inclinaison et à sa profondeur.

    » Nous avons vérifié cette singulière observation près Saint-Gilles, à trois quarts de lieue au couchant de la ville de Liège : il y a plus, la première couche, qui est près du jour, forme une infinité de plans inclinés qui viennent se réunir à un même centre, de sorte qu’on peut voir tout autour les endroits où elle vient sortir à la surface de la terre : les couches inférieures suivent la même loi ; mais, par rapport à l’étendue qu’elles prennent en plongeant, on n’aperçoit que deux plans inclinés, qui sont très sensibles ; par exemple, en visitant les mines du Verbois, qui sont un peu plus au nord-ouest de Liège que celles de Saint-Gilles, nous avons observé que les couches dirigées de l’est à l’ouest sont inclinées du côté du midi, tandis que celles qu’on exploite à Saint-Gilles, qui ont la même direction, s’inclinent du côté du nord. L’expérience a prouvé à tous les houilleurs de ce pays que, dans l’un et l’autre endroit, on exploitait les mêmes couches, formant, comme nous l’avons dit, deux plans inclinés ; mais, entre Saint-Gilles et le Verbois, il y a un vallon qui a la même direction que les couches, et même inclinaison de chaque côté… On exploite à une des portes de la ville, au nord de la Meuse, les mêmes couches, mais inférieures, qui prennent leur inclinaison du côté du midi sous la ville, en se rapprochant de la rivière ; et il est très douteux que dans cet endroit elles se relèvent pour sortir au jour : cela n’est pas probable, mais plutôt de l’autre côté de la Meuse… On compte du côté du nord plus de quarante couches de charbon, séparées les unes des autres par de petits rochers d’une épaisseur depuis cinq jusqu’à dix-sept toises, sans pouvoir faire mention de celles qu’on ne connaît pas, et qui peut-être sont encore plus bas. Ces couches ne sont pas dans la même mine : il n’y en a point d’assez profondes pour cela ; mais la même chose s’observe dans différentes exploitations ; car il est des mines qui, étant beaucoup inférieures à d’autres, ou éloignées des endroits où sortent au jour les veines supérieures, ne peuvent rencontrer que celles qui sont au-dessous de ces premières : ces couches n’ont qu’une moyenne épaisseur, c’est-à-dire de trois à quatre pieds ; on n’en a vu qu’une de six pieds…

    » Les couches de charbon qui sont séparées des précédentes par la Meuse sont bien différentes des premières ; avec leur direction de l’est à l’ouest, elles sont presque perpendiculaires, ou du moins approchant plus de la ligne perpendiculaire que de l’horizontale : lorsqu’elles s’inclinent, c’est au nord ou au midi ; mais ce qu’elles ont de particulier, c’est qu’on nous a assuré qu’elles imitaient les premières dans leur marche, c’est-à-dire qu’elles s’enfoncent en terre d’un côté, pour venir ressortir de l’autre, mais avec une irrégularité très singulière : par exemple, une telle couche ou veine descend à peu près perpendiculairement jusqu’à trente toises de profondeur ; là elle prend une inclinaison de quarante degrés pendant une distance de vingt toises, reprend ensuite la ligne perpendiculaire, et puis remonte enfin, fait des sauts en s’enfonçant par des angles plus ou moins grands, et forme ainsi des plans inclinés de toute espèce ; d’autres entrent dans la terre par une ligne perpendiculaire, prennent au fond une position presque horizontale, et remontent