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d’une formation bien postérieure à celle des mines arsenicales, puisque le soufre est entré dans leur composition et qu’ils ont été sublimés ensemble par les feux souterrains. On assure qu’à la Chine l’orpiment et le réalgar se trouvent en si grandes masses qu’on en a fait des vases et des pagodes : ce fait démontre l’existence présente ou passée des volcans dans cette partie de l’Asie.

Pour réduire l’arsenic en régule, on en mêle la poudre blanche sublimée avec du savon noir et même avec de l’huile ; on fait sécher cette pâte humide à petit feu dans un matras, et on augmente le degré de feu jusqu’à rougir le fond de ce vaisseau. M. Bergman donne la pesanteur spécifique de ce régule dans le rapport de 8 310 à 1 000, ce qui, à 72 livres le pied cube d’eau, donne 598 livres 34/100 pour le poids d’un pied cube de régule d’arsenic. Ainsi la densité de ce régule est un peu plus grande que celle du fer et à peu près égale à la densité de l’acier. Ce régule d’arsenic a, comme nous l’avons dit, plusieurs propriétés communes avec les demi-métaux : il ne s’unit point aux terres, il ne se dissout point dans l’eau, il s’allie aux métaux sans leur ôter l’éclat métallique, et, dans cet état de régule, l’arsenic est plutôt un demi-métal qu’un sel.

On a donné le nom de verre d’arsenic aux cristaux qui se forment par la poudre sublimée en vaisseaux clos : mais ces cristaux transparents ne sont pas du verre, puisqu’ils sont solubles dans l’eau ; et ce qui le démontre encore, c’est que cette même poudre blanche d’arsenic prend cet état de prétendu verre par la voie humide et à la simple chaleur de l’eau bouillante[1].

Lorsqu’on veut purger les métaux de l’arsenic qu’ils contiennent, on commence par le volatiliser autant qu’il est possible ; mais, comme il adhère quelquefois très fortement au métal et surtout au cuivre, et que par le feu de fusion on ne l’en dégage pas en entier, on ne vient à bout de le séparer de la matte que par l’intermède du fer, qui, ayant plus d’affinité que le cuivre avec l’arsenic, s’en saisit et en débarrasse le cuivre : on doit faire la même opération, et par le même moyen, en raffinant l’argent qui se tire des mines arsenicales.


DES CIMENTS DE NATURE

On a vu, par l’exposé des articles précédents, que toutes les matières solides du globe terrestre, produites d’abord par le feu primitif ou formées ensuite par l’intermède de l’eau, peuvent être comprises dans quatre classes générales.

La première contient les verres primitifs et les matières qui en sont composées, telles que les porphyres, les granits et tous leurs détriments, comme les grès, les argiles, schistes, ardoises, etc.

La seconde classe est celle des matières calcinables, et contient les craies, les marnes, les pierres calcaires, les albâtres, les marbres et les plâtres.

La troisième contient les métaux, les demi-métaux et les alliages métalliques formés par la nature, ainsi que les pyrites et tous les minerais pyriteux.

Et la quatrième est celle des résidus et détriments de toutes les substances végétales et animales, telles que le terreau, la terre végétale, le limon, les bols, les tourbes, les charbons de terre, les bitumes, etc.

  1. Il faut pour cela mettre la dissolution de cette chaux dans quinze parties d’eau bouillante, et laisser ensuite refroidir cette dissolution ; on obtient alors de petits cristaux en segments d’octaèdres, etc. : c’est un verre d’arsenic formé par un degré de chaleur bien peu considérable. Lettres de M. Demeste, t. II, p. 118.