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doit aussi rapporter au manganèse ce que plusieurs autres ont écrit de cette substance sous les noms d’hématites noires, mamelonnées, veloutées, etc.

On trouve des mines spathiques de fer, et par conséquent du manganèse, dans plusieurs provinces de France, en Dauphiné, en Roussillon ; d’autres à Baigory et dans le comté de Foix ; il y en a aussi une mine très abondante en Bourgogne, près de la ville de Mâcon ; cette mine est même en pleine exploitation, et l’on en débite le manganèse pour les verreries et les faïenceries : on trouve dans cette mine plusieurs sortes de manganèses, savoir, le manganèse en chaux noire, le manganèse en masses solides et noires, et le manganèse cristallisé en rayons divergents.

La mine de manganèse ne se réduit que difficilement en régule, parce qu’elle est très difficile à fondre, et en même temps très disposée à passer à l’état de verre[1] : ce régule est au moins aussi dur que le fer ; sa surface est noirâtre, et, dans l’intérieur, il est d’un blanc brillant qui bientôt se ternit à l’air ; sa cassure présente des grains assez grossiers et irréguliers ; en le pulvérisant il devient sensiblement attirable à l’aimant ; un premier degré de calcination le convertit en une chaux blanche qui se noircit par une plus forte chaleur, et son volume augmente d’un cinquième environ ; si l’on met ce régule dans un vaisseau bien clos, il se convertit par l’action du feu en un verre jaune obscur, et le fer qu’il contient se sépare en partie et forme un petit bouton ou globule métallique.

Le régule de manganèse se dissout par les trois acides minéraux, et ses dissolutions sont blanches : la chaux noire de manganèse se dissout dans l’alcali fixe du tartre et lui communique sur-le-champ une belle couleur bleue.

Ce régule refuse de s’unir au soufre et ne s’allie que très difficilement avec le zinc, mais il se mêle avec tous les autres minéraux métalliques ; lorsqu’on l’allie dans une certaine proportion avec le cuivre, il lui ôte sa couleur rouge, sans lui faire perdre sa ductilité : au reste, ce régule contient toujours du fer, et il est, comme celui du nickel, celui du cobalt et comme le platine, si intimement uni avec ce métal, qu’on ne peut jamais l’en séparer totalement. Ce sont des alliages faits par la nature que l’art ne peut détruire, et dont la substance, quoique composée, est aussi fixe que celle des métaux simples.

Le manganèse est d’un grand usage dans les manufactures des glaces et des verres blancs : en le fondant avec le verre, il lui donne une couleur violette dont l’intensité est toujours proportionnelle à sa quantité ; en sorte que l’on peut diminuer cette couleur violette jusqu’à la rendre presque inapercevable ; et en même temps, le manganèse a la propriété de chasser les autres couleurs obscures du verre et de le rendre plus blanc lorsqu’il n’est employé qu’à la très petite dose convenable à cet effet. C’est dans la fritte du verre qu’il faut mêler cette petite quantité de manganèse : sa couleur violette, en s’évanouissant, fait disparaître les autres couleurs, et il y a toute apparence que cette couleur violette, qu’on ne peut apercevoir lorsque le manganèse est en très petite quantité, ne laisse pas d’exister dans la substance du verre qu’il a blanchi ; car M. Macquer dit avoir vu un mor-

    tantôt, et plus communément, il est strié, brillant, solide et ressemble à de l’antimoine par son éclat, par sa couleur qui est d’un gris noirâtre, et par sa pesanteur : cependant il est plus tendre, plus friable, plus cassant, plus graveleux dans ses fractures ; il est presque toujours traversé de veines ou de filons blancs et quartzeux. Minéralogie de Bomare, t. II, p. 154.

  1. Pour obtenir ce régule, il faut pulvériser la mine, en former une boule en la délayant avec de l’huile et de l’eau, la mettre dans un creuset, environnée de toutes parts de poussière de charbon, et l’exposer à un feu de la dernière violence ; encore ne la trouve-t-on pas réunie en un seul culot, mais en globules disséminés qui sont quelquefois à trente centièmes du poids de la mine.

    Le régule de manganèse est à l’eau distillée dans le rapport de 6 050 à 1 000. (Bergman, Opuscules, t. II, dissert. 19.)