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3o Que le cobalt n’est pas plus essentiel au nickel, puisqu’on parvient à l’en séparer, et même que le cobalt précipite le nickel de sa dissolution par le foie de soufre ;

4o Qu’il n’est pas possible de le priver de tout son fer, et que plus on multiplie les opérations pour l’en dépouiller, plus il devient magnétique et difficile à fondre ; ce qui le porte à penser qu’il n’est, comme le cobalt et le manganèse, qu’une modification particulière du fer. Voici ses termes :

« Solum itaque jam ferrum restat, et sanè variæ eædemque non exigui momenti rationes suadent niccolum et cobaltum et magnesiam forsan non aliter ac diversissimas ferri modificationes esse considerandas[1]. » On voit, par ce dernier passage, que ce grand chimiste a trouvé par l’analyse ce que j’avais présumé par les analogies, et qu’on effet le cobalt, le nickel et le manganèse ne sont pas des demi-métaux purs, mais des alliages de différents minéraux mélangés, et si intimement unis au fer qu’on ne peut les séparer.

Le cobalt, le nickel et le manganèse, ne pouvant être dépouillés de leur fer, restent donc tous trois attirables à l’aimant : ainsi, de la même manière qu’après les six métaux, il se présente une matière nouvellement découverte à laquelle on donne le nom de platine, et qui ne paraît être qu’un alliage d’or, ou d’une matière aussi pesante que l’or avec le fer dans l’état magnétique, il se trouve de même, après les trois substances demi-métalliques, de l’antimoine, du bismuth et du zinc, il se trouve, dis-je, trois substances minérales, qui, comme le platine, sont toujours attirables a l’aimant et qui, dès lors, doivent être considérées comme des alliages naturels du fer avec d’autres minéraux ; et il me semble que, par cette raison, il serait à propos de séparer le cobalt[2], le nickel et le manganèse des demi-métaux simples, comme le platine doit l’être des métaux purs, puisque ces quatre minéraux ne sont pas des substances simples[NdÉ 1], mais des composés ou alliages qui ne peuvent être mis au nombre des métaux ou des demi-métaux dont l’essence, comme celle de toute autre matière pure, consiste dans l’unité de substance.

Le nickel peut s’unir avec tous les métaux et demi-métaux ; cependant le régule non purifié ne s’allie point avec l’argent, mais le régule pur s’unit à parties égales avec ce métal, et n’altère ni sa couleur ni sa ductilité. Le nickel s’unit aisément avec l’or, plus difficilement avec le cuivre, et le composé qui résulte de ces alliages est moins ductile que ces métaux, parce qu’ils sont devenus aigres par le fer, qui, dans le nickel, est toujours attirable à l’aimant. Il s’allie facilement avec l’étain et lui donne aussi de l’aigreur ; il s’unit plus difficilement avec le plomb, et rend le zinc presque fragile ; le fer forgé devient au contraire plus ductile lorsqu’on l’allie avec le nickel ; si on le fond avec le soufre, il se cristallise en aiguilles[3] ; enfin, le nickel ne s’amalgame pas plus que le cobalt et le fer avec le mercure[4], même par le secours de la chaleur et de la trituration.

Au reste, le minerai du nickel diffère de celui du cobalt en ce qu’étant exposé à l’air il se couvre d’une efflorescence verte, au lieu que celle du cobalt est d’un rouge rosacé. Le nickel se dissout dans tous les acides minéraux et végétaux ; toutes ses dissolutions sont vertes et il donne avec le vinaigre des cristaux d’un beau vert.

  1. Dissert. de niccolo. Opuscul., t. II, p. 260.
  2. M. Brandt, chimiste suédois, est le premier qui ait placé le cobalt au rang des demi-métaux ; auparavant, on ne le regardait que comme une terre minérale plus ou moins friable.
  3. M. Bergman, Dissert. de niccolo. — M. de Morveau, Éléments de chimie, t. Ier, p. 232.
  4. Idem, t. III, p. 447.
  1. Buffon se trompe ; ces quatre substances ont tous les caractères des corps dits simples.