Page:Buffon - Œuvres complètes, éd. Lanessan, 1884, tome III.djvu/44

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

en plateur à quatre cents pieds. Ce charbon, mêlé de beaucoup de pyrites, n’est que d’une qualité médiocre, et il est à peu près semblable à celui qu’on apporte du Havre, et qui vient de Sunderland en Angleterre[1].

En Bretagne, il y a des mines considérables de charbon à Montrelais et à Languin, dans les environs de Nantes : l’on a aussi tenté des exploitations à Quimper, à Plogol et à Saint-Brieux, et l’on aperçoit des affleurements de charbon dans plusieurs autres endroits de cette province[2].

On pourrait citer un grand nombre d’autres exemples qui prouveraient qu’il y a dans le royaume de France des charbons en aussi grande quantité, et peut-être d’aussi bonne qualité qu’en aucune autre contrée du monde. Cependant, comme c’est un préjugé établi, et qui jusqu’à présent n’était pas mal fondé, que les charbons d’Angleterre étaient d’une qualité bien supérieure à ceux de France, il est bon de les faire connaître : on verra que la nature n’a pas mieux traité à cet égard l’Angleterre que les autres contrées, mais que l’attention du gouvernement, ayant secondé l’industrie des particuliers, a rendu profitable et infiniment utile à cette nation ce qui est demeuré sans produit entre nos mains.

On distingue dans la Grande-Bretagne trois espèces de charbon de terre. Le charbon commun se tire des provinces de Newcastle, de Northumberland, de Cumberland et de plusieurs autres ; il est destiné pour le feu des cuisines de Londres, et c’est aussi presque le seul qu’on emploie à tous les ouvrages métalliques d’Angleterre.

La seconde espèce est le charbon d’Écosse ; on s’en sert pour chauffer les appartements des bonnes maisons : ce charbon est feuilleté et comme formé en bandes séparées par des couches plus petites que les bandes, et néanmoins plus marquées et plus distinctes à cause de leur éclat. Il se tire en grosses masses bien solides, d’une texture fine, et, quoique formé de bandes et de petites couches, il ne s’effeuille point ; il est bitumineux et brûle librement, en faisant un feu clair, et tombe en cendres[3].

La troisième espèce, que les Anglais appellent culm, se trouve dans le Glamorganshire et en divers endroits de cette province. C’est un charbon fort léger, d’un tissu fort lâche, composé de filets capillaires disposés par paquets, qui paraissent arrangés en quelques endroits de manière à représenter dans beaucoup de parties des feuillets assez étendus, très lisses et très polis, lesquels, pour la plupart, affectent une forme circonscrite en portion de cercle, avec des rayons divergents. Ce charbon est peu ou presque point pyriteux ; il brûle aisément et fait un feu vif, ardent et âpre. Dans la province de Cornouailles, il est d’un très grand usage, particulièrement pour la fonte des métaux, à laquelle on l’applique de préférence.

On trouve, dans les comtés de Lancastre et de Chester, une espèce de charbon qu’on n’apporte pas à Londres, c’est le kennel ou candle-coal : communément il sert de pierre à marquer, de même que ce qu’on appelle le charbon du toit ; il se tire en grosses masses très solides, d’une texture extrêmement fine, et d’un beau noir luisant comme le jayet. Ce charbon ne contient aucune portion pyriteuse ; il est si pur et si doux, qu’on peut le tour-

  1. Du charbon de terre, par M. Morand, p. 570.
  2. Note communiquée par M. le chevalier de Grignon.
  3. « L’Écosse va de pair, dit M. Morand, avec la partie méridionale de l’Angleterre pour l’abondance du charbon de terre : on en trouve des mines près d’Édimbourg et dans le comté de Lenox, dans les provinces de Fife, de Sterlin, de Sutherland, de Dernoch, etc. M. Strachey a donné, dans les Transactions philosophiques, année 1725, la description des mines de charbon qui se trouvent en Écosse ; elles ne sont pas à une grande profondeur ; la plupart n’ont que d’un à quatre pieds et demi d’épaisseur de charbon : la seule mine qui soit fort épaisse est celle d’Anchenchangh, à six milles de Kilsyth, qui a dix-huit pieds d’épaisseur, et que les sources d’eau trop abondantes empêchent l’exploiter. » Du charbon de terre, par M. Morand, p. 99, 113 et suiv.