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bagne, à Pépin, route de Marocelle ; mais ce charbon de la mine de Pépin répand, longtemps après avoir été tiré de la mine, une odeur particulière et désagréable.

En Franche-Comté, la mine de Champagney, à deux lieues de Béfort, est très abondante, et le charbon en est de fort bonne qualité : la veine a souvent huit pieds d’épaisseur, et elle est partout d’une égale bonté ; elle paraît s’étendre dans toute la base du monticule qui la renferme ; il y a plusieurs autres mines de charbon dans les environs de Champagney et dans quelques autres endroits de cette province[1] ; il y en a aussi quelques mines en Lorraine, mais l’exploitation n’en a pas encore été assez suivie pour qu’on juge de la qualité de ces charbons. En Alsace, il s’en trouve près de Schelestat[2].

Il n’y a point de mines de charbon dans le Cambrésis ; mais celles du Hainaut sont en grand nombre, et celles de Fresnes et d’Anzin sont devenues fameuses. On a commencé à fouiller celle de Fresnes en 1717 et celle d’Anzin en 1734 : on en tire aussi aux environs de Condé. Le charbon de ces mines est en général de bonne qualité[3] ; on assure même qu’il est plus gras et qu’il dure plus au feu que celui d’Angleterre : le charbon qui se tire à Fresnes est plus compact que les autres, et pèse un dixième et plus que celui d’Anzin. Le charbon de Quiévrain, à deux lieues et demie de Valenciennes, est aussi d’une excellente qualité : on a fouillé quelques-unes de ces mines jusqu’à sept cents pieds de profondeur[4]. M. Morand dit que, dans la mine de M. des Androuins près de Charleroi, l’eau est tirée de soixante-trois toises de profondeur, et que le charbon est placé à cent huit toises au-dessous, ce qui fait en tout cent soixante et onze toises, ou mille vingt-six pieds de profondeur[5].

Dans l’Anjou, l’on a trouvé des mines de charbon de terre à Concourson, à Saint-George de Chateloison, à Doué, et à Montreuil-Bellay : les charbons qui se tirent près de la surface du terrain ne sont pas si bons que ceux qui gisent à une plus grande profondeur ; la veine a ordinairement six à sept pieds d’épaisseur. Ce charbon d’Anjou est de bonne qualité ; cependant on n’a de temps immémorial trouvé dans cette province que des veines éparses sous des rocs placés à dix-huit pieds de profondeur, auxquels succède une terre qu’on y appelle houille, qui est une espèce de mauvais charbon, avant-coureur du véritable ; les veines y sont très sujettes aux creins, et par conséquent irrégulières : il y en a cinq de reconnues ; leur épaisseur est depuis un pied jusqu’à quatre, et même jusqu’à douze pieds, suivant M. de Voglie ; elles paraissent être une dépendance de celles de Saumur avec lesquelles elles se rapportent en tout. Leur direction générale est du levant au couchant[6].

Dans la basse Normandie, il se trouve du charbon de terre à Litry, et la veine se rencontre à peu de profondeur au-dessous d’une bonne mine de fer en grains ; elle se forme

  1. Les mines de Ronchamp, en Franche-Comté, présentent un phénomène bien singulier et que je n’ai vu nulle part. Dans les masses de charbon, immédiatement sous les lames de pyrites plus particulièrement que dans les couches de pur charbon, il se trouve une couche légère de charbon de bois bien caractérisé par le brillant, la couleur, le tissu fibreux, une consistance pulvérulente, noircissant les doigts ; et lorsqu’un morceau de houille contenant des lames de ce charbon de bois est épuré, qu’il est encore rouge et que l’on souffle dessus, le charbon de terre s’éteint et celui de bois s’embrase de plus en plus.

    L’on trouve fréquemment à la toiture de ces mines, parmi le grand nombre d’impressions de plantes de toute espèce, des roseaux (bambous) de trois à quatre pouces de diamètre aplatis, et qui ne sont point détruits ni carbonifiés. (Lettre de M. le chevalier de Grignon à M. de Buffon ; Besançon, le 27 mai 1781.)

  2. Du charbon de terre, par M. Morand, p. 149 et suiv.
  3. Idem, p. 144 et suiv.
  4. Idem, p. 182.
  5. Idem, p. 453.
  6. Idem, p. 545 et 547.