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DU ZINC[1]

Le zinc ne se trouve pas, comme le bismuth, dans un état natif de minéral pur, ni même comme l’antimoine dans une seule espèce de mine ; car on le tire également de la calamine ou pierre calaminaire et de la blende, qui sont deux matières différentes par leur composition et leur formation, et qui n’ont de commun que de renfermer du zinc : la calamine se présente en veines continues comme les autres minéraux ; la blende se trouve, au contraire, dispersée et en masses séparées dans presque toutes les mines métalliques : la calamine est principalement composée de zinc et de fer[2] ; la blende contient ordinairement d’autres minéraux avec le zinc[3]. La calamine est d’une couleur jaune ou rougeâtre, et assez aisée à distinguer des autres minéraux ; la blende, au contraire, tire son nom de son apparence trompeuse et de sa forme équivoque[4] : il y a des blendes qui ressemblent à la galène de plomb[5] ; d’autres qui ont l’apparence de la corne, et que les mineurs allemands appellent horn-blende ; d’autres qui sont noires et luisantes comme la poix, auxquels ils donnent le nom de pech-blende, et d’autres encore qui sont de différentes couleurs, grises, jaunes, brunes, rougeâtres, quelquefois cristallisées, et même transparentes, mais plus souvent opaques et sans figure régulière. Les blendes noires,

  1. Paracelse est le premier qui ait employé le nom de zinc. Agricola le nomme contrefeyn, on l’a appelé stannum indicum, parce qu’il a été apporté des Indes en assez grande quantité dans le siècle dernier ; les auteurs arabes n’en font aucune mention, quoique l’art de tirer le zinc de sa mine existe depuis longtemps aux Indes orientales. Voyez la Dissertation de M. Bergman sur le zinc.
  2. M. Bergman a soumis à l’analyse la calamine de Hongrie, et il a trouvé qu’elle tenait au quintal quatre-vingt-quatre livres de chaux de zinc, trois livres de chaux de fer, douze de silex et une d’argile, sur quoi j’observerai que la matière de l’argile et celle du silex ne sont qu’une seule et même substance, puisque le silex se réduit en argile en se décomposant par les éléments humides.
  3. M. Bergman a trouvé que la blende noire de Danemora tenait au quintal quarante-cinq livres de zinc, neuf de fer, six de plomb, une de régule d’arsenic, vingt-neuf de soufre, quatre de silex et six d’eau.
  4. Ce mot blende signifie dans le langage des mineurs allemands une substance trompeuse, parce qu’il y en a qui ressemble à la galène de plomb. Dictionnaire d’histoire naturelle, par M. de Bomare, article Blende (blind, éblouir, tromper les yeux).
  5. On a donné à la mine de zinc blanchâtre le nom de fausse galène ; mais, quoique le tissu de cette dernière soit à peu près feuilleté comme celui de la galène, les feuillets qui la composent sont cependant moins distincts et moins éclatants que ceux de la mine de plomb sulfureuse ; sa pesanteur spécifique est d’ailleurs beaucoup moins considérable ; au reste, il est aisé de distinguer la blende d’avec la galène, car, si l’on gratte avec un couteau le morceau dont l’apparence est équivoque, il s’en dégagera, si c’est une blende, une odeur de foie de soufre des mieux caractérisées… M. de Born nous a fait connaître une blende transparente, d’un vert jaunâtre qui se trouve à Ratieborzis en Bohême. J’en ai vu des échantillons qui avaient la transparence et la couleur de la topaze et de la chrysolithe. Enfin, quoique le tissu de la blende soit presque toujours lamelleux ou feuilleté, il s’y rencontre quelquefois des morceaux qui, par leur tissu fibreux ou strié, imitent assez bien la mine d’antimoine grise ; on les en distingue facilement à leur couleur d’un gris sombre et à l’odeur de foie de soufre qu’on en dégage par le frottement… Cette dernière sorte de blende est commune dans les mines de Pompéan ; elle a moins d’éclat que la manganèse et ne tache point les doigts comme cette substance. Lettre du docteur Demeste, t. II, p. 176, 180 et 181.