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Les eaux qui coulent dans les terres voisines des mines de charbon sont de qualités différentes : il y en a de très pures et bonnes à boire ; mais ce ne sont que celles qui viennent des terres situées au-dessus des charbons ; celles qui se trouvent dans le fond de leur mine sont quelquefois bitumineuses et plus souvent vitrioliques et alumineuses ; l’alun ou le vitriol martial, qu’elles tiennent en dissolution, sont eux-mêmes très souvent altérés par différents mélanges[1] ; mais, de quelque qualité que soient les eaux, celles qui croupissent dans la profondeur des mines les rendent souvent inabordables par les vapeurs funestes qu’elles produisent. L’air et l’eau ont également besoin d’être agités sans cesse pour conserver leur salubrité ; l’état de stagnation dans ces deux éléments est bientôt suivie de la corruption, et l’on ne saurait donner trop d’attention, dans les travaux des mines, à la liberté de mouvement et de circulation toujours nécessaire à ces deux éléments.

Après avoir exposé les faits qui ont rapport à la nature des charbons de terre, à leur formation, leur gisement, la direction, l’étendue, l’épaisseur de leurs veines en général, il est bon d’entrer dans le détail particulier des différentes mines qui ont été et qui sont encore travaillées avec succès, tant en France que dans les pays étrangers, et de montrer que cette matière se trouve partout où l’on sait la chercher : après quoi, nous donnerons les moyens qu’il faut employer pour en faire usage et la substituer sans inconvénient au bois et au charbon de bois dans nos fourneaux, nos poêles et nos cheminées.

Il y a, dans la seule étendue du royaume de France, plus de quatre cents mines de charbon de terre en pleine exploitation, et ce nombre, quoique très considérable, ne fait peut-être pas la dixième partie de celles qu’on pourrait y trouver. Dans toutes ou presque toutes ces mines, il y a trois ou quatre sortes de charbons : le charbon pur, qui est ordinairement au centre de la veine ; le charbon pierreux, communément mêlé de plus ou moins de matières calcaires ou de grès ; le charbon schisteux et le charbon pyriteux. Ceux qui contiennent du schiste sont les plus rares de tous, et cela seul prouverait que la substance principale du charbon ne peut être de l’argile, puisque le vrai schiste n’est lui-même qu’une argile durcie. Il y a des charbons qui se trouvent pyriteux dans toute l’épaisseur et l’étendue de leur veine : ce sont les moins propres de tous aux travaux de la métallurgie ; mais, comme on peut les épurer en les faisant cuire, et qu’ordinairement ils contiennent moins de bitume que les autres, ils donnent aussi moins de fumée, et conviennent souvent mieux pour l’usage des cheminées que les charbons trop chargés de bitume. La grande quantité de soufre, qui se forme par la combustion des premiers, ne

    charbon que par l’ancienne méthode, ce qui a fait adopter la nouvelle par toute l’Angleterre où MM. Boulton et Watt en ont déjà établi plusieurs avec beaucoup d’avantage pour eux et pour les propriétaires.

    » Pour juger de l’effet étonnant de cette machine, il suffit de savoir qu’avec le feu de cent livres de charbon de terre de bonne qualité, elle élève

    » À la hauteur de 1 pieds.......... 500000
    pieds cubes d’eau.
    » À celle de..... 10 pieds.......... 50000
    » À celle de..... 100 pieds.......... 5000
    » À celle de..... 1000 pieds.......... 500

    » Quant aux conditions, MM. Boulton et Watt se font donner, pour toute chose, le tiers du bénéfice que produit annuellement leur nouvelle machine, comparée à l’effet et à la dépense d’une ancienne machine de pareille force qui aurait à élever le même volume d’eau d’une profondeur égale : ce tiers doit leur appartenir pendant les quatorze années de la durée de leur privilège ; plusieurs entrepreneurs des mines d’étain de Cornouaille, assurés par leur propre expérience du succès constant de cette nouvelle machine, ont racheté, pour une somme comptant, cette indemnité annuelle, qu’ils doivent payer pendant quatorze années à MM. Boulton et Watt. » Paris, le 5 juillet 1780.

  1. Du charbon de terre, etc., par M. Morand, p. 29.